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                             LAMARTINE                    38l


   Parmi ce fatras de confidences, Lamartine ne pouvait
manquer de mettre ses rêves poétiques. Il expose en effet
le plan du gigantesque poème qu'il a conçu, et à ceux qui
s'étonneraient que l'auteur délicat des Méditations ait songé
à des choses aussi démesurées, il confiera lui-même, en
propres termes, qu'il a souvent senti en lui un autre
homme, que « des horizons immenses, infinis, lumineux,
d'une poésie philosophique, épique, religieuse, neuve, se
déroulent devant ses yeux. » Un jour qu'il est à rêver près
des murs de Jérusalem, il entend le chant des vêpres en
même temps qu'il voit de vieux moines se promener en
récitant leur bréviaire sur la terrasse d'un couvent :
« C'étaient donc, dit-il, les psaumes de David, rapportés
après trois mille ans, par des voix étrangères et dans une
langue nouvelle, sur ces mêmes collines qui les avaient
inspirées. Et moi, j'étais là aussi pour chanter toutes ces
choses ; pour étudier les siècles à leur berceau ; pour
remonter, jusqu'à sa source, le cours inconnu d'une civili-
sation, d'une religion ; pour m'inspirer de l'esprit des lieux
et du sens caché des histoires et des monuments, sur ces
bords qui furent le point de départ du monde moderne, et
pour nourrir d'une sagesse plus réelle et d'une philosophie
plus vraie, la poésie grave et sensée de l'époque où nous
vivons (4). »
   Jocelyn, qui parut au commencement de 1836, valait heu-
reusement mieux que toutes ces promesses. Il valait surtout
mieux que l'Avertissement par lequel le poète l'expliquait et
prétendait le justifier. « L'intérêt du genre humain, disait
Lamartine, s'attache au genre humain lui-même... L'épopée



  {4) Jéricho, j novembre 1832.