page suivante »
LAMARTINE 33I légation de Florence, il partait en 1821 pour la Toscane, et dans cette belle patrie des arts où sa renommée l'avait précédé, c'est par des fêtes splendides qu'il fut accueilli. Bientôt il épousait une jeune Anglaise qui joignait la qualité d'héritière à une grande beauté, et, peu après, la mort d'un oncle le rendait riche lui-même. On peut se demander si pareille fortune avait jamais accablé un homme. Dans cet empressement pourtant, qui jetait aux pieds du poète tout ce qui paraît désirable en ce monde, parmi les fées qui entouraient à l'envi cette gloire au berceau, une fée sembla se dérober, et c'était la reine de toutes, c'était la fée des beaux vers. Non sans raison, elle bouda l'homme heureux qui lui devait tout et qui la délaissait. Le second recueil de Lamartine, les Nouvelles Méditations, qui parut en 1823, est très inférieur au premier. Le poète, gâté par la faveur universelle, avait cru suffisant cette fois de vider pêle-mêle son tiroir. C'était d'autant plus une erreur que la révélation était faite, et le secret connu. Il eût fallu au moins que des variations d'une haute originalité fussent venues compenser le peu de nouveauté du thème. Or, étaient-ce les distractions et la dissipation ? Etait-ce, au milieu de cette surabondance, de cette luxuriance de l'am- plification, je ne sais quelle infirmité du génie ? Toujours est-il que sur les vingt-six Nouvelles Méditations, il y e n avait bien une dizaine de notoirement faibles, pour lesquelles on ne serait que juste en les traitant de délayages. Malgré que l'auteur leur eût adjoint, au hasard, quelques pièces fort belles, Bonaparte, le Poète mourant, et surtout les Préludes, cela ne formait pas du recueil un tout estimable, cela n'en formait même pas un véritable tout. Lamartine aura tou- jours, dorénavant, le tort d'en prendre trop à son aise avec le public.