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LES ALl-'S DANS LE NORD 23!) l'influence grecque et latine. Sur la foi de légendes écloses dans le milieu créé par le christianisme, certains auteurs prétendent que les alfs tendent des pièges à notre faible espèce. L'amour, à ce qu'ils disent, serait la cause de ces méchants tours, dont se rendraient coupables les seuls alfs des prairies et des eaux. Voici la manière d'agir des premiers : à la tombée de la nuit, vers l'heure où la pleine lune se dévoilant à l'horizon revêt tous les objets de sa clarté douteuse, quand le calme règne par les vallons et le sommeil par les villages, les plus jolies des feldâlfennes, avant que de remonter à leurs cou- ches aériennes, se livrent sur les pelouses au plaisir de la danse. A l'exemple du chœur des Nymphes et des Grâces pudiques du vieil Horace, elles aiment sur toute chose à mener la ronde ; elles la mènent si correctement même, que le lendemain, au réveil de l'aurore, un cercle irrépro- chable, formé par leurs pas dans l'herbe humide de rosée, révèle leur divertissement nocturne au regard émerveillé des pâtres. Ce cercle est la famense chorea Elvarum, « danse en rond des Alfs, » de Saxon-le-Grammairien, Elf-dans de Keightley, et le prosaïque « rond des sorciers » du peuple des champs dans notre France du centre. Les feldâlfennes dansent donc. En ce moment survient le jeune garçon pour qui soupire un cœur dans la ronde périlleuse : un pouvoir latent, irrésistible, l'a fait sortir de sa chaumière ou de son castel. Il regarde surpris d'a- bord, charmé bientôt. Les yeux d'azur tendre, les cheve- lures flottantes et couronnées de roses, les beaux pieds nus, les voix de sirène ; tout ce déploiement imprévu de jeunesse, de grâce et de beauté, jette son âme dans un ravissement dont il ne se rend pas compte. S'il cède à la tentation, s'il s'approche de cette danse où tant de doux sourires l'invi- tent, s'il s'y laisse entraîner, ce qui n'arrive que trop sou-