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236                  LES ALFS DANS LE NORD
vent, selon le véridique Torfœus, adieu l'amour, adieu
l'hyménée sur la terre ! Les noces de l'imprudent se célé-
breront chez les Alfs,à vingt mille mètres peut-être au-dessus
du chaume de la cabane paternelle, au-dessus des girouet-
tes armoriées du castel natal (1).
    Le procédé des séâlfennes est plus simple, mais non
moins insidieux. Je vous ai conté comme quoi ces génies,
grands amateurs de musique, font ouïr leurs concerts, en
planant à la surface des lacs, au tomber des nuits printan-
 nières. Là est l'embûche. Qu'une jeune fille, entraînée à
 son insu sur le bord de ces eaux perfides, prête une oreille
 trop avide aux chants, aux sons mélodieux qu'elle entend
 sans voir musiciens ni lyre, elle est perdue ! Tandis qu'elle
 écoute, affolée, cette symphonie à laquelle Le Roux de
 Lincy attribue le pouvoir de troubler les âmes, le virtuose
 ailé qui l'aime s'insinue à travers les joncs et les sagittaires,
 bordure épaisse de la rive, d'un bras enveloppe sa taille, de
 l'autrela soulève de terre et l'emporte, avant qu'elle n'ait le
 temps de se reconnaître, dans un palais de nacre, au fond
 mystérieux des ondes; procédé classique du reste. C'est
 celui qu'emploie dans l'Argonautique une nymphe de la
 Propontie éprise du jeune Hylas « la Naïade le happe de
 ses mains passionnées ; le bel enfant s'écrie, appelle à son
 secours le grand Alcide, son ami ; trop tard, hélas ! Elle



   (1) Thermodus Torfœus, historien de la Norwège au xvn e siècle,
savant exact et intègre, mais, dit Mallet, un peu trop crédule, avait
recueilli de la bouche d'un prêtre irlandais cette tradition du mariage
des Alfs avec desfillesd'Eve et de celles-ci avec des Alfs. « Créés, dit-il,
de la volonté de Dieu, les Alfs existent comme nous existons, se marient
et se reproduisent comme nous, et ce que l'on sait des amours de plu-
sieurs filles des Alfs avec de beaux jeunes hommes en est une preuve
 convaincante. » (Ch. Torf., édit. Saga de Hrolf, adprœf.)