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372 LE PAGE DU BARON DES ADRETS. nouvelle qui devenait puissante ; les huguenots s'agi- taient et Lyon était dans la consternation. De vagues rumeurs circulaient, tous les habitants vivaient dans une incertitude cruelle. Chaque nuit, on voyait se ras- sembler dans la grande hôtellerie de la rue Longue des personnages à figure sinistre qui passaient la nuit dans des orgies épouvantables. La campagne était infestée de gens de mauvaise mine. Chaque matin on courait aux nouvelles sur la place Saint-Jean , et pour comble de malheur, la pluie tombait depuis quelques jours à torrents. La Saône grossissait à vue d'œil et déjà elle atteignait les bords des quais. C'était le 13 décembre 1562, à trois heures du soir, !a nuit semblait couvrir déjà la ville désolée. Le gou- verneur, Antoine d'Albon, homme plein d'énergie sortit- de son hôtel avec son capitaine des patrouilles ; leurs officiers firent fermer les portes et recommandèrent aux habitants de se pourvoir dé vivres pour plusieurs jours et de préparer des armes pour faire face à toutes les éventualités. 11 était facile de voir qu'on touchait à de graves événements. Quand onze heures sonnèrent à l'horloge de Saint- Nizier, la pluie redoubla. La Saône débordait avec'une violence extrême. La place des Jacobins, la Guillotière étaient sous les eaux, les maisons s'écroulaient sous leur choc avec un fracas épouvantable ; au milieu du bruit on entendait des cris déchirants : c'était les der- niers adieux des pauvres victimes. Les églises qui n'étaient pas inondées étaient rem- plies de fidèles épouvantés intercédant le ciel, les prêtres étaient aux autels récitant les prières des morts ; la