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4-10          LA PARESSE D'UN PEINTRE LYONNAIS.

détestable réputation, et celle-là aussi est usurpée; son nom
 fait pousser des cris de paon a la jeune et ardente généra-
 tion des barbouilleurs de toile : « Quel paresseux ! s'écrie-
 t-on en chœur, lorsque xsa personnalité est en jeu. Du ta-
lent, c'est vrai ; mais il n'a rien produit. Deux toiles au
 Musée, voilà son bagage. On a fait du bruit autour de sa pre-
mière œuvre, et puis, c'est tout. D'ailleurs, pourquoi eût-il
travaillé ? il est riche. Comme le bon Jean de Lafontaine il a
passé la moitié de sa vie à dormir et l'autre à ne rien faire;
à quoi l'eût mené un plus rude labeur? Au fond, il a bien fait. »
    Pas un de nos lecteurs, pour peu qu'il s'occupe de pein-
ture, pour peu qu'il suive nos expositions, n'aura besoin de
demander le nom de cet exécrable fainéant. Le dernier rapin
le connaît. Le voilà, c'est lui, c'est bien lui, c'est Claude-
Anthelme-Honoré Trimolet !
    Et, malheureusement, cette réputation, c'est bien un peu
l'auteur qui se l'est faite. Dans une autobiographie publiée
par VA Revue, en 1850, M. Trimolet qui croyait railler, faire
du paradoxe et broder une charmante plaisanterie à l'usage
de son ami Châtelain, M. Trimolet s'amuse à parler de sa
paresse innée, de son amour insurmontable pour la flânerie
et le farniente; il déclare qu'il ne fait rien, n'a rien fait et
ne fera jamais rien ; mais la preuve qu'il n'en pense pas un
mot, c'est que, dans sa notice, qu'il ne pouvait raisonnable-
ment pas trouver mal écrite, il se plaint de ne pas savoir
tenir la plume, de n'avoir ni intelligence ni esprit, de n'être
en tout qu'un misérable singe et de n'avoir jamais essayé
que ce qu'il ne savait pas faire. A cette bonhomie gouail-
leuse, à cette verve gauloise, le public avait bien compris
que l'auteur se moquait, mais, pour se venger, il feignit
de croire à cette prétendue paresse, et les mêmes bons
lecteurs qui n'acceptèrent pas que M. Trimolet fût un écri-
vain rabâcheur et pesant, consentirent, sur sa parole et sans