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372                LÉGENDES DE LA VILLE D'ARS.

portait peut-être encore. Peu à peu l'humble bourgade gran-
dit ; l'église ou chapelle fut élevée sur une petite éminence,
à l'abri de l'humidité ou des hautes eaux. Qui sait môme si
la ligne de pilotis dont j'ai parlé plus haut ne daterait pas
de cette époque et n'aurait pas été plantée pour défendre le
nouveau centre d'habitations contre l'affouillement des eaux
du lac?...
    Il en est des villages comme des hommes. Heureux ceux
qui n'ont point d'histoire ! Heureux ceux qui vivent paisibles
et ignorés!... Mais tout bonheur a une fin: Ars allait en
faire la triste expérience.
    Ici se place naturellement la fondation de la Sylve-bénite,
de ses agrandissements successifs et de la destruction de
la seconde ville d'Ars, suivant le récit traditionnel, mais en
 dépouillant celui-ci de son appareil légendaire et en le ra-
 menant aux proportions plus simples et plus véridiques dont
 il n'aurait jamais dû s'écarter.
    Les habitants d'Ars végétaient dans le bonheur dont je
 parlais tout a l'heure, lorsque les Chartreux vinrent fonder
 dans leur voisinage la troisième maison de leur Ordre. Tout
 se passa bien d'abord. Les Annales disent que ces moines,
 à l'époque de cette fondation, vécurent dans la plus grande
 indigence des biens de ce monde, mais riches des biens cé-
 lestes : « Igitur à tempore primse fundationis in magna re-
 rum temporalium indigentia, magnis tamen gratise bonis di-
 tati, nostri in hac sylva delituerunt usque ad annum 1167,
 quo Fredericus imperator, etc. » Il paraît qu'on se lasse de
 tout, et même des meilleures choses, car, ces biens ne leur
 suffisant plus, les Chartreux d'alors songèrent a d'autres ri-
chesses. Terric se chargea de leur en faciliter les moyens.
 « Bien désintéressé dans la question, dit M. Michal-Ladi-
chère (1), je ne puis me décider à voir qu'une chose, fort
  (I) Mémoire déjà cité p. 7 et 8.