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ON NE CROIT PLUS A RIEN. 79 Si quelqu'un ne croyait plus à rien, en ce moment, croyez que c'était moi ! A rien? Si ce n'est a la police, que j'avais soulevée pour ma cause ; caril fallait le trouver, cet infâme ravisseur. Vaine confiance ! J'impatientai la police en l'accusant de tiédeur, et je me vis seul a sonder cet abîme. J'avais couru, cherché, interrogé; nul indice. Chez lui le vide; rien dans les meubles Où étaient ses poches, mon Dieu? Sa portière, qui était en même temps sa femme de ménage, — pauvres employés, nous sommes tous obligés de subir ce service, —m'avait intro- duit dans son domicile. Cette femme était sombre, je la regardai. Serait-elle complice de sa fuite? allai-je penser, — on s'accroche à tout dès qu'on ne croit plus à rien. — A tout hasard, je me mis a lui reprocher son crime avec violence, la menaçant des plus terribles châtiments si elle ne faisait des révélations. Ah! bien, oui !.... Dans ce siècle sans croyances, on n'a plus même le crédit d'intimider une vieille femme. Celle-ci en appela à son balai, me le montrant, d'un geste antique, avec ce mot plus moderne, que n'eût point désavoué le concierge fameux des Thermopyles : Cinq minutes, monfils! ! Prise par la douceur, elle voulut bien me dévoiler les sou cis de son âme. Elle confessa d'abord que Ravinel était un gueux, de quoi nous.tombâmes facilement d'accord ; ensuite, qu'il lui devait six mois de ses gages, ce qui amena entre nous un échange touchant de condoléances. Enfin, elle m'ex- prima le ferme espoir d'être payée par moi, en ma qualité d'ami de Ravinel. Ici, nous ne nous entendions plus, et je travaillais à détruire cette extrême illusion, lorsque, tout Ã