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VOYAGE DE LYON A YENNE. 393 trants en font ressortir la chaude vigueur. La rive opposée esl un verger, entremêlé de vignes, de bouquets de frênes, de massifs de noyers et autres beaux arbres groupés en som- bres et mystérieux berceaux, ou alignés en fraîches avenues. N'est-ce pas Pomone qui apparaît la-bas sous ces lianes fleu- ries?... Eh non ! c'est une grosse fille à tignasse hérissée qui garde une vache maigre et nombre de petits cochons... Quel malheur d'avoir de bons yeux ! Une montagne aride, haute, abrupte, à pic, nous barre la route. Le fleuve s'est-il creusé une voie souterraine sous ces énornles blocs? Tombe-l-il en cataracte dans quelque vaste tissure?.,. Comme l'épée de Rolland, le fleuve a tout sim- plement coupé la montagne en deux... Combien de siècles pour ronger le colosse de la tête aux pieds? — Qui le sait! Celte ligne noire que vous apercevez dans l'angle, c'est l'ou- verture de la brèche. Ces dalles blanches sur l'escarpement, ce sont les murs de Pierre-Châtel. En attendant qu'il nous soit possible d'admirer d'assez près la sublime horreur du site, prêtons l'oreille à la causerie de nos trois grands politiques. Ils viennent justement s'asseoir à nos côtés. L'nn d'eux caresse mon chien. — Jolie petite bêle ! dit-il, lout en lisant le nom gravé sur le collier. Comme les deux premières épithètes, au moins, ne me sont pas appli- cables, je pense que le compliment s'adresse à Stopp, et une bouffée de légitime orgueil, bon et naïf orgueil de proprié- taire! me monte au cerveau. Stopp, plus modeste, se dérobe aux éloges et va s'étendre au soleil... La question de chasse esl aussitôt sur le tapis; et nous avons le bonheur de tomber sur des lypes parfaitement tranchés. Le premier appartient à l'espèce précieuse des chasseurs convaincus —venalorinflexibilis. — Pour lui la chasse n'est pas un agréable et sain passe-temps : c'est quelque chose de sacré, un sacerdoce. Il professe un profond mépris envers