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MOSAÃQUES D'UN RÊVEUR. 471 et de chasteté est capable des plus grandes Å“uvres el des plus sublimes actions. Par vous, je conçois bien la vie érèmilique, les jeûnes de quarante jours dans le désert et l'irrésistible attrait du monas- tère sur certaines âmes meurtries. Quiconque est né fort cl vous a goûtées pendant sa jeu- nesse peut entrer hardiment dans la bataille de la vie : Le monde est à lui. Quant aux cÅ“urs que le monde a blessés, ils trouveront en vous le baume souverain de leurs plaies. V. La gaîté est souvent un masque trompeur. Tel qui paraît avoir un caractère enjoué couve parfois dans son cÅ“ur de grands chagrins. Ce ne sont pas lés hommes à la figure aus- tère et triste qui souffrent le plus; ce sont souvent ceux qui ont les traits mobiles et rieurs. ' Les bilieux, qui rient du bout des lèvres, éprouvent, soyez- en sûr, des peines morales beaucoup moins aiguës que ces natures sanguines et nerveuses dont la joie est bruyante et le rire olympien : ces dernières ressentent la douleur encore plus vivement que la joie, elles souffrances du cÅ“ur sont chez elles excessives. Douleurs el joies sont en raison directe de l'impressionnabililô de l'individu, et qui rit beaucoup, pleure beaucoup aussi. Esope, Démocrile, Rabelais, Mon- taigne, Molière et Balzac avaient des accès de fou rire; mais c'était un rire trempé de larmes. Beaucoup d'hommes sont crus gais jusqu'à leur (in ; mais si l'on avait le secrel de leur destinée, nul ne voudrait de leur gaîté au prix qu'ils l'ont payée.