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- 246 ÉLOGE DE RAVE2. jours d'orage garderait au moins comme une ancre tutélaire celte perpétuité du sacerdoce judiciaire, qui doit survivre k toutes les vicissiludes du Pouvoir comme à toutes les formes de gouvernement. Mais^Ravez n'entendit pas que son fauteuil fût plus ina- movible que le Trône : il tenait tout du Roi, et ne voulait rien garder quand le Monarque avait tout perdu. Je ne pense pas qu'il se trouve des esprits disposés à blâmer de telles susceptibilités; en tout cas, je demande grâce pour elles, car elles ne risquent guère de devenir contagieuses. Sans doute d'autres conduites peuvent loyalement se tenir, et souvent d'honorables motifs les justifient : le pays ne peut se condamner, à l'immobilité, ni le talent h l'impuissance. 11 faut a la société une magistrature, une administra- tion, un enseignement, une armée, et le pays aime mieux confier de tels dépôts h des mains expérimentées que de les voir livrer à d'aveugles ambitions ou à d'aventureuses médiocrités. Les amis du passé se souviennent avec orgueil que les brillants officiers de l'armée d'Afrique, qui furent les dignes compagnons de nos princes, sont devenus les géné- raux triomphateurs de la Crimée, et le patriotisme qui sa- lua nos victoires du désert, ne s'incline pas avec moins de fierté devant les palmes de Sébastopol. La vraie fidélité ne «contraint personne, elle se suffit à elle-même. Elle sait honorer ceux qui emploient leurs forces au bien du pays, pourvu qu'ils s'honorent à leur tour, en se faisant respecter par le Pouvoir qu'ils servent aujourd'hui, et en respectant eux-mêmes le Pouvoir qu'ils servaient hier. Mais Ravez jugea qu'il est des positions exceptionnelles qui ne doivent pas se séparer du gouvernement dont elles ont partagé la vie. II avait eu, pendant neuf années, l'hon-