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*U2 UNE NOCE. — Tout au milieu, vous savez bien ce que je veux vous dire? — De qui est donc celte charmante valse ? demanda Fré- déric qui s'était rapproché. — Voyons, ne me persécutez pas tous les deux, dit Louise ; elle est de je ne sais qui ; celle valse je vous l'assure, je l'ai tout à fait oubliée et n'en saurais plus trouver la première noie. Le reste de la soirée se passa agréablement. Afin de per- mettre aux musiciens de se reposer, on essaya de danser aux chansons, mais les danseuses-chanteuses furent bientôt obli- gées de s'arrêter, fauie de souffle, comme dit la mère Glairay, qui prélendit avoir pu, pendant son jeune temps, chanter, toul en dansant le branle el le rigodon, pendant des heures entières. Les jeunesfillesse récrièrent, les jeunes gens rirent beaucoup, mais des vieillards, dont la tête chenue tremblait un peu, assurèrent que la mèreClairay avait été la plus pin- panle danseuse de Léontaud. — Aulrefois, il y a longtemps, longtemps de cela, hasarda une voix flûtée dans le groupe des jeunes filles. — Ah ! si ce n'était pas mon bâlon, dit la mère, et si je n'avais pas autant de voix qu'une cigale enrhumée, je vous montrerais bien que les vieux valent encore quelque chose. — Ah! dansez, dansez donc, la mère. — La vieille sourit d'un franc sourire où revint avec un peu de malice quelque jeune souvenir, et elle parcourut de ses yeux noirs le cercle qui l'entourait, puis elle dit : Fon- taine, mon compère, vous souvenez-vous de celle belle Saint- Denis où nous dansâmes toule la nuit, avec voire femme, et moi avec mon pauvre Clairay, il y a bien trente-cinq ans, n'est-ce pas? Trente-six, Benetle, puisque c'était l'année de voire ma- riage. Nos jambes d'alors sont bien rouillées.