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384 ÉTUDES LITTÉRAIRES CONTEMPORAINES. leur argent, on les conduisit devant le pavillon du duc qui, incontinent, ordonna qu'ils fussent tous pendus aux arbres d'alentour sans qu'il en échappât un seul, — L'exécution s'acheva dans moins de quatre heures , che fo in spatio di quatro hore , non volendo pure scumpasse un regazo. E un terribilia et horrore vedere tanli impicali. » Le duc tenait ainsi ce qu'il avait promis quelques jours auparavant, tuti li fara impicare o matière in filo di spada, écrivait Paniga- rola le 23 du même mois , et il comptait sur ces moyens terribles pour effrayer les Suisses : il les exaspéra. Le duc ne voulut pas s'arrêter et résolut d'attaquer sans attendre l'armée qui se formait devant lui et s'accroissait à toute heure : il s'y préparait avec entrain, espérant en finir cette fois; « il compte sur une victoire facile, ajoute de Genève le marquis Pallavicini au duc de Milan , mais on sait que bellorum evenlus dubii sunt, » et le lendemain le même correspondant avait à confirmer sa triste prédiction. Paniga- rola, à son tour, vient nous raconter la défaite de Granson qu'il appelle la plus vilaine déroute du monde, la rotta la piu vile cosa fosse mai al mundo, et il nous dit que cepen- dant elle fut peu meurtrière pour les Bourguignons : selon lui, le duc était parvenu à faire descendre les Suisses des hauteurs boisées qu'ils occupaient et à les envelopper, quand quelques escadrons voulurent compléter ce mouvement par une conversion ; les gens de guerre et les charretiers qui se tenaient en arrière la prirent pour une retraite et crièrent un sauve qui peut qui, comme d'ordinaire, entraîna tout le monde ; la relation de l'ambassadeur milanais offre le plus grand intérêt. Charles-le-Téméraire ne se laissa pas trop abattre et dès le 7 il mandait ses nouveaux projets à la duchesse de Savoie en l'assurant qu'il ne prendrait pas de repos qu'il n'eût délivré son pays de la présence de l'enne- mi « avec l'aide de Dieu et de saint Georges son patron. » * »