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i8i L\ TUUQU1K AU XVIe S1ECMÎ. en Europe n'avait d'armée a opposer a une armée de la Turquie. Nous savons ce qu'étaient les armées européennes. Celles (lui prirent part aux guerres d'Italie montaient rarement au chiffre de quarante mille hommes : les armées de la Porte atteignaient sans peine celui de deux et même de trois cent mille. Chez les Turcs, la nation entière combattait. Elle n'a vait d'autre occupation que la guerre. Les feudataires, aban donnant la culture du sol a des vaincus ou rayas, étaient tenus de servir sans solde dans la cavalerie irrégulière. Char gés des anciennes armes nationales, d'arcs, de massues de 1er, de poignards, de sabres et de lances, ils parcouraient en peu de jours sur des chevaux rapides de vastes espaces, les plaines du Danube, par exemple , où leur course ne rencon trait point d'obstacles. Avides de butin et de pillage, leur cruauté n'épargnait rien. Derrière eux s'avançaient les corps réguliers soldés , et particulièrement la redoutable infanterie des janissaires qui passaient pour manier l'arquebuse avec une extrême dextérité. Ces corps réguliers pourvus de meilleures armes, composés d'hommes choisis et exercés qu'animait un même esprit, qui portaient très-haut le sentiment de leur valeur et ne connaissaient d'autre patrie que leur drapeau , qui se distinguaient enfin par la simplicité de leur tenue mi- litaire et le bon ordre de leurs camps ou de leurs casernes , ces corps , dis-je , atteignaient seuls un chiffre supérieur à celui des armées européennes ordinaires. Ils avaient encore sur ces armées un autre avantage , c'est que le Sultan n'y donnait les grades qu'au mérite, et qu'on n'y connaissait nulle distinction de rang : l'esclavage avait tout nivelé. C'est la qu'était la force de la Turquie. Elle comptait sur la bonne discipline et la supériorité numérique de ses trou- pes, quoique les janissaires seuls eussent des armes qui va- lussent celles des chrétiens. Pour le génie et l'artillerie , les