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LA TURQUIE AU XVIe SIÈCLE. 485 Turcs étaient tout au plus les égaux de leurs adversaires. Leur marine était peu redoutable dans le principe ; elle ne se composait guère que de corsaires. Mais les sultans mirent à profit les révolutions perpétuelles des Etats barbaresques : ils y soutinrent des prétendants qu'ils élevèrent au pouvoir, et qu'ils traitèrent ensuite en subordonnés. La suprématie qu'ils acquirent sur ces Etats leur permit d'augmenter les forces navales de leur empire , et le nombre des bâtiments turcs devint en effet très-considérable sous Soliman , dans un temps où la Méditerranée connaissait à peine d'autres flottes chrétiennes que celles des Vénitiens et des Génois. Ce qui acheva de rendre la puissance des Ottomans ter rible a l'Europe, c'est que les conquêtes de Sélim et de So- liman enrichirent leur trésor des dépouilles des nations vain- cues. Aucun prince chrétien n'avait alors de richesses égales a celles du Grand-Seigneur, quoique les pays soumis au joug musulman fussent bien plus malheureux et bien plus pauvres que les autres contrées européennes. Depuis le XVIe siècle tout a changé autour des Turcs. Les Etats de l'Europe ont tiré un plus grand parti de leurs res- sources naturelles, développé leur commerce et leurs finan- ces , augmenté leurs armées, perfectionné leur science mi litaire, élevé autour d'eux un rempart de forteresses. Les Turcs sont restés ce qu'ils étaient, ou peu s'en faut. Leur système de gouvernement s'est à peine modifié ; ils se sont bornés à tirer tout ce qu'ils ont pu des provinces cou quises , et comme ces provinces ont été épuisées de bonne heure , ils ont cessé de s'enrichir , le jour où ils ont cesse d'en conquérir de nouvelles. Sans doute ils ont participé aux progrès militaires des autres nations européennes ; mais il ne se les sont appropriés que tard , et toujours avec répu- gnance S'ils ont changé, ç"a été a leur désavantage. Ils avaient