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TROIS MOIS AU-DELA DES ALPES. 463
poser des fatigues de la guerre; inflexible Caton tu ne
reverras plus l'agrandissament de ta patrie ; et vous,Horten-
sius et Cicéron, désormais vos éloquentes voix seront muet-
tes. Innombrables armées des consuls, de Barberousse et des
papes qu'est devenu votre tumulte? Quel écho redira vos
cris de mort? Le soleil radieux, du haut de ses plaines d'azur
sourit toujours a tant de nobles souvenirs ; les brises des mers
caressent toutes ces ombres qui errent sur ces collines en
proie peut-être aux passions qui ont agité leur vie, et la reine
des nuits couronne encore le front de cette cité qui n'est
plus d'une auréole de mélancolie et de tristesse, ou plutôt
exhalte la rêverie du voyageur attardé, afin qu'il se souvienne
des vanités de la gloire et de la rapidité de la vie.
En descendant, nos guides, fort effrontés et quelque peu
facétieux de leur nature, nous régalèrent avec un Français
à la Robinson d'histoires de sorciers, de faits plus ou moins
miraculeux ; de temps a autre ils se grattaient le bout de
l'oreille comme pour trouver plus facilement le mot qu'ils
cherchaient. Par contre, je les gratifiais de mon italien et
j'ossifiais littéralement le tympan de leurs oreilles avec mes
barbarismes et ma prononciation.
Grâce a Dieu, à Frascati nous quittâmes guides et ânes
pour reprendre nos calèches. Jusqu'à Gvotta - Ferrata. on
voyage continuellement sur une route très-belle, luxueuse-
ment ombragée par des arbres pour la plupart séculaires.
Ce sont tantôt des gorges profondes et sombres tantôt des
cascatelles qui descendent des hauteurs en éblouissants pa-
naches. Ici le village de Marino est coquettement assis sur
des pentes verdoyantes et fleuries ; là Castel-Gandolfo pré-
sente le front sévère de son castel féodalement perché sur
son roc solitaire. A Grotta-Ferrata nous laissâmes le château-
fort de Jules II, qui n'a rien d'intéressant au point de vue ar-
tistique, pour visiter dans les plus grands détails l'église et le