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414 ESTIENNE DO TRONCHET. en jetant les yeux sur la notice bibliographique placée à la fin de cette étude. A l'apparition des Missives, du Tronchet reçut, entre autres féli- citations, une lettre de François Secondât, avocat à Toulouse, dans laquelle on remarque le passage suivant : « Bien que la « France soit riche de beaucoup d'esprits graves, grands et sin- « guliers en profondité de plusieurs et diverses doctrines , il en « est peu toutesfois qui sçachent bien et nettement former une « lettre missive , avec le langage , l'air et la douceur, l'énergie, « l'invention et le mérite de son pouvoir. » Il le loue, en termes tout à fait dignes de lui, d'avoir régénéré le style épistolaire, et de « n'avoir rien oublié de ce qui appar- « tient à la réputation d'une si louable et proffitable entre- « prinse » d'avoir découvert « ces insinuations gracieuses.... « et brief toutes choses afferantes et requises à toutes manières « d'hommes : qui ont esté incogneûes, barbares, et mal venues « jusques icy. » Je n'ai eu garde d'omettre ce passage si concluant en faveur de la thèse que j'ai soutenue au commencement de cette notice. Quelle que fût l'emphase de du Tronchet, à l'en croire, il fut encore dépassé par quelques écrivains. Dans son Thresor de la Plume en France, il se plaint de l'abus des titres et épithètes ; « quant à moy, dit-il, « je pense mériter en cela moins que les « autres. » En ce qui concerne l'imitation des Italiens, voici comment il s'exprime : « S'il est aujourd'hui en propos de discourir de la « guerre, des factions, d'une cavallerie, d'une infanterie, d'une « escuyerie, des armes, voire de l'amour, et généralement de « toutes choses graves et ordinaires, les plus beaux traicts « des plus disertes langues qui se veulent faire ouyr, la pluspart « sont puisez dans les propres facultez de l'Italie. Et puisqu'il est « question en ces miennes lettres de pillage et d'usurpation, il « ne m'a pieu de faire mon butin en plus opulentes cassines. » Il paraît qu'il ne se contenta pas d'imiter le Bembo et Pé- trarque; suivant Antoine du Verdier et l'abbe Goujet, il se serait plus d'une fois paré des plumes du paon ; mais le pauvre diable