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                          M. RENARD.                         435
dont l'éclat passager ne sert qu'à faire ensuite la nuit plus obs-
cure.
   Par sa position, que souvent j'ai entendu appeler privilégiée,
Lyon jouit effectivement, sous ce rapport, d'une prérogative sin-
gulière. Son titre de seconde capitale, lui donnant évidemment
des droits à quelque chose d'un peu mieux que le fameux panier
à quinze sous, sans cependant pouvoir prétendre au premier
choix, il arrive que souvent on a cru se mettre en règle avec
nos exigences en nous offrant de ces sujets, ou à peu près mûrs
oa déjà un peu faits, fermes sur la note, maîtres-jurés en l'art
des trois débuts, sachant quand il faut pousser, et poussant, Dieu
merci I bons pensionnaires, d'ailleurs, en style administratif, et,
dans leurs rapports avec le public, aussi incapables de parci-
monie que de folle prodigalité. Et il faut bien se déclarer satis-
fait quand, à force d'intrigues et à prix d'or, ma foi ! on a pu
exhiber à notre admiration l'homme rare, le née plus ultrà^àe
l'art en matière de direction, pour tout dire en un mot, le té-
nor inempoignable l
   Donc, de cette cohorte bigarrée de chanteurs écloppés ou im-
berbes qui, chez nous comme en terre conquise, viennent, sans
façon, finir leur apprentissage ou commencer leur retraite, c'est,
je l'avoue, pour mes sens et mon âme la fête la plus enivrante,
quand je vois, comme cette année, surgir une belle et franche
nature, une originalité accentuée et puissante. Ce que nous
avions en Sirand, ce qu'on avait perdu depuis Delahaye, nous
le possédons aujourd'hui. Acclamé à son apparition, marquant
chaque création par un triomphe , M. Renard a pris d'emblée
 sa place d'adoption dans la grande famille lyonnaise. Nos bravos
l'ont fait nôtre ; et son nom marquera désormais dans l'histoire
 lyrique de ce théâtre qui, non sans raison, aime à se vanter
 d'avoir fait et défait plus d'une gloire nationale.
    L'instrument, chez notre chanteur, est admirable d'étendue,
 de vigueur et d'éclat. Sa voix de poitrine, qui à rencontre des
 faux-ténors, s'épure en montant, atteint sans difficulté, et ce
 semble aussi sans la moindre fatigue, ces limites scabreuses
  du si naturel, voire même de Vut, à l'occasion, (je ne dis pas