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                  LYON A L'EXPOSITION DE LONDRES.                           167


                                           Londres, 10 juin I 8 5 I .   "

          MOSSRUR,


   J e reviens, avec l'Europe entière, à cette merveilleuse Exposition de Lyon,
qui fera époque dans les annales des Expositions industiielles. Il ne suffit pas
de s'écrier, comme tous les spectateurs : « Beau! magnifique ! admirable ! »
Il faut entrer dans quelques détails sur cet événement, analyser ce chef-d'œuvre
et en faire apprécier toute la portée à nos concitoyens. La ville de Lyon n'a
pas seulement surpassé toutes les fabriques rivales, si tant est qu'il y en ait :
elle s'est surpassée elle-même, et vous pouvez juger de cette vigoureuse sève
par le seul fait qu'un septième seulement des fabricants lyonnais s'est présenté
à l'Exposition ; mais ce sont les maîtres de l'art.
    J e vous ai dit qu'ils avaient eu l'heureuse pensée de faire abnégation de
leurs individualités pour paraître en nom collectif. On ne voit, en effet, qu'un
seul nom, celui de la ville de Lyon, qui plane sur tous les produits et qui sem-
ble les couvrir de sa glorieuse renommée. L'union a fait leur force, et ces
illlustres anonymes brillent d'un éclat plus vif que s'ils avaient affiché leurs
noms propres. J'aurais souhaité que la fabrique de meubles-et de papiers
peints parisienne, imitant leur exemple, se fut bornée à cette simple inscrip-
tion : Paris, faubourg Saint-Antoine !... Cela eût voulu d i r e : « Vous nous
prenez pour des barbares qui ne savent que détruire : voilà comment nous
travaillons quand nous ne mettons pas le feu aux quatre coins de l'Europe. »
Et l'Europe aurait répondu : « Travaillez, Messieurs, c'est plus beau. »
   Commençons par rendre justice aux. deux hommes qui ont présidé à cette
brillante exhibition lyonnaise, et qui veillent sur elle, à Londres, avec une
sollicitude paternelle : ce sont MM. Arlès-Dufoui', membre du jury pour Lyon,
et M . Gamot, directeur de la Conditions des soies. L'un, plein de feu, de zèle
et d'ardeur, représente la fougue ouvrière; l'autre plus calme, doux, méditatif,
ressemble au Génie des affaires. II leur revient une bonne part du succès de
la grande cité, et il ne fallait pas moins que leurs mérites réunis pour mener
à bonne fin cette exposition mémorable, dont les préparatifs n'ont pas été
sans difficultés. Voici comment ils ont accompli la tâche délicate qui leur
était confiée.
    Ils ont réuni en un seul faisceau tous les articles lyonnais de même espèce,
sans distinction d'origine, et ils les ont fait disposer sous le jour le plus fa-
vorable. Ainsi toutes les étoffes unies sont étalées ensemble depuis les qua-
lités les moins chères jusqu'à celles du prix le plus élevé. Les velours coupés
ou frisés viennent ensuite suivis des taffetas, satin et gros de Naples ; puis
les crêpes, les peluches, les foulards, les façonnés, les brocards, les étoffes
d'église et de palais. Chaque genre réunit toutes ses variétés, et il suffit d'un
regard attentif pour embrasser de la manière la plus complète cette immense
famille de tissus qui fait l'orgueil de la fabrique.
   On s'attendait d'autant moins à admirer ce que nous allons décrire, gue
l'exposition de 1849 avait laissé dans les esprits une impression fâcheuse
d'insuffisance et de détresse. Il était évident que la ville de Lyon n'avait pas
figuré d'une manière digne d'elle à cette solennité industrielle, et qu'elle por-
tait des traces profondes du désordre moral et politique produit par les évé-
nements de r S 4 8 . On peut juger qu'elle a été la surprise générale, à l'aspect
de ces étoffes nouvelles d'une variété et d'une richesse incomparable qui lais-
saient bien loin derrière elles tout ce qui a été fait jusqu'à ce jour, même Ã