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       REVUE DES THÉÂTRES ET DES CONCERTS.

   L'Église avait une hymne touchante, une hymne où la plus expansive dou-
leur éclatait en sanglots dans le chant le plus simple et le plus émouvant que je
sache; eh bien ! le théâtre vient de la lui enlever. Le Slabal est à cette heure
une distraction pour les oisifs. Cette grande douleur de la mère du Christ
pleurant sur son fils, le divin Pendu, n'est plus, de par Rossini, qu'une solen-
nité musicale où l'on va comme à une soirée, pour laquelle on se pare comme
pour un bal, que l'on entend comme une œuvre d'art et dont on entremêle
chacun des versets de causeries profanes, de réflexions et de saillies plus ou
moins piquantes. De sentiment religieux, il n'en est pas question ; l'effet mu-
sical est tout.
  A qui la faute? n'est-ce point un peu au clergé? l i a eu le grand tort de s'isoler
des arts, de les dédaigner comme des moyens inutiles. Leur influence pourtant
est immense sur les masses. Que l'on rende à nos basiliques le jeu sublime des
orgues, que l'on reprene les maîtres de chapelle, que l'on décore les murailles
nues de nos temples ! Que la musique, la peinture et la statuaire, en parlant
à l'imagination des fidèles, leur apportent de durables enseignements. De cor-
rupteurs et de mondains qu'ils sont, les arts redeviendront alors ce qu'ils
ont été autrefois, de puissants véhicules pour la religion et la civilisation.
  Quoiqu'il en soit, notre habile chef d'orchestre, M. George Hainl, est venu
clore par le Slabal de Rossini la longue série de concerts que nous subissions
depuis trois mois, et jamais plus brillante ni plus nombreuse assemblée ne
s'était donné rendez-vous    dans la salle du Grand-Théâtre. L'exécution de
l'œuvre a répondu à cet honorable empressement. Chanteurs, musiciens et
choristes ont fait de leur mieux. Le bénéficiaire a prouvé tour à tour que le
chef d'orchestre était à la hauteur du violoncelliste.
  Au moment où finissait le Slabal, Musard, le Napoléon du quadrille, accou-
rait en poste de Paris, en trente cinq heures, et venait présider à la Rotonde
le bal de la Mi-carême, après avoir présidé celui de l'Opéra. Deux mille francs
pour tenir toute une nuit le sceptre de la contredanse et de la valse ! huit
cents francs de frais de route pour Musard et son piqueur ! voilà ce que le
directeur de la Rotonde n'a pas craint de risquer contre les chances d'une
recette éventuelle. Musard est une célébrité qui vaut bien la peine d'être
étudiée. Il y a chez lui une profonde intelligence musicale, et il sutlit de le
voir à son pupitre commander la mesure, les nuances et le sentiment de*