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29 Il resta longtemps sans avoir de communication avec per- sonne ; il se mit ensuite à sortir pour prêcher, et alors il acquit une réputation plus grande qu'avec sa bravoure, qu'avec sa grande bonté. Il se répandait parmi le peuple, surloul dans les campagnes, car c'est pour le peuple, disait-il, c'est pour les pau- vres spécialement que Jésus-Christ a parlé, ce fut parmi les hum- bles qu'il voulut choisir ses disciples, les prémices de l'Eglise. 11 instruisait donc l'ignorance du peuple sur l'égale origine des hommes, sur leur commune destination; il faisait voir d'où l'on vient et où l'on va. Les plus simples devoirs, les plus calmes ver- tus des pères, des fils, des époux, des artisans devenaient son thème perpétuel, et il était simple, vulgaire même dans son langage, distribuant le pain de la parole suivant la capacité de chacun; se faisant petit, comme Elisée, pour raviver des membres petits. Il était donc en odeur de sainteté, car, bien qu'il n'eût pas été en pèlerin au mont Gargano, à Rome, en Terre-Sainte ; bien qu'il n'opérât aucun prodige, il faisait, cependant le plus insigne miracle, celui de rendre meilleurs les hommes par sa parole et par son exemple. Ensuite, comme dans ces masses sans éducation, il arrivait des rixes, des insultes trop fréquentes, et pire que cela encore, il s'a- donnait tout entier à ramener la concorde, et obtenait de merveilleux effets de conversion. Je pourrais en rappeler beaucoup, mais je me bornerai à un seul. Une fois, à la Cavédra, maison de son Ordre, un des Bossi et un des Azzati, principaux habitants de l'endroit, en vin- rent à des paroles, et des paroles aux faits. Derrière eux une foule qui prenait parti, menaçait d'un sanguinaire désordre. — II faut appeler Buonvicino, dit une voix prudente. Ainsi fait-on. Il accourt, cherche à apaiser ces deux hommes irrités, leur rappelant les promesses et les menaces du Christ, qui veut que nous soyons humbles comme lui. Mais Bossi, le plus arrogant et le plus bizarre, aveugle dans sa colère,