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soldats, à tous ces généraux qui rêvaient l'asservissement du
monde, au milieu des armes, des rapines et des débauches.
D'après tous les témoignages de l'antiquité, Virgile com-
posa ses dix Eglogues dans l'espace de trois ans, c'est-
à-dire depuis l'âge de vingt-neuf ans jusqu'à celui de
trente-deux. Il y chanta les louanges de tous ses protec-
teurs, la clémence d'Octave, la mort de César dont le nom
couvrait les desseins de son petit-neveu, la gloire de Pol-
lion et la naissance de son fils, la science et la bonté de Varus,
les amours de Gallus. Théocrite avait célébré les champs
dans le palais des Ptolémées; Virgile célébra aux champs les
exploits et les bienfaits de ses illustres amis. Le premier a écrit
de véritables pastorales; le seconda composé plus souvent des
allégories bucoliques. Voilà la grande différence qu'il faut
faire entre le maître grec et l'élève latin.
   Considérées en elle-mômes, les Eglogues sont comme les
soupirs d'une ame tendre, déjà lassée quoique jeune, et qui
se refait aux champs, non sans quelques tristes retours, une
seconde innocence. Les pipeaux des bergers ne sont pas
seulement l'instrument favori d'une civilisation qui est à ses
commencements; c'est à leur voix argentine que le jeune
homme se plaît à associer ses désirs et ses pensées : il me
semble en entendre la mélodie simple et rêveuse dans les
premiers vers de Virgile. La couleur claire et douce dont
Raphaël revêtit les figures candides de sa première manière,
me paraît avoir aussi les rapports les plus voisins avec le
souffle limpide et pur du chalumeau virgilien. L'ame qui se
révèle au monde n'a pas besoin de tous ces artifices que le
raffinement du goût et la multitude des sensations rendent
plus tard nécessaires; c'est aux plus naïfs accords de la lumière
 on du son, qu'elle confie l'expression de ses sentiments. Je
 serais fort porté à croire que Virgile ne connaissait pas
 les splendeurs du ciel napolitain, lorsqu'il composa ces pe-