page suivante »
223 La renaissance des études classiques se fait aussi vivement sentir : Elisabeth prononça plusieurs fois des harangues la- tines dans ses visites aux Universités de Cambridge et d'Ox- ford; plusieurs citoyens fondèrent, à leurs frais, des collèges où l'on enseignait la rhétorique, l'astronomie, la géométrie, la physique et les langues anciennes ; lorsque quelques nuages s'étaient élevés entre la reine et son premier minis- tre, c'était avec des citations de l'Ecriture, ou avec des tirades de Virgile et d'Horace que Cecil les dissipait. Elisabeth tra- duisit Boèce, elle ornait ses dépêches de grec et de latin ; lady Burleigh et lady Bacon étaient plus fières de leur savoir que de leur naissance, et Smith de professeur devint ambas- sadeur-ministre ; on nous permettra de ne pas prononcer ici un de ces noms qui n'appartiennent pas à une époque par- ticulière, W. Shakspeare. — Cependant," l'ardeur pour les études classiques ne fut que secondaire en présence de la grande invasion biblique qui caractérise la littérature anglaise de ce temps-là , et ici je ne puis m'empocher de faire une ob- servation qui n'est pas seulement applicable à l'Angleterre; elle portait autrefois le nom de joyeuse Angleterre, tnerry England; la Réforme ne serait-elle pas une cause du chan- gement opéré dans le caractère national? Le protestantisme, religion de doute et d'examen, préoccupe trop l'esprit au dé- triment du cœur : examiner est un travail, croire est un plaisir : la raison et la foi ont toujours lutté dans le monde, et cette lutte n'est pas encore terminée : si celle-là triomphe, adieu les purs épanchements du cœur, les doux épanouisse- ments de l'ame ! Elle pourra se glorifier de ses penseurs pro- fonds, elle pourra montrer avec orgueil Bacon et Leibnitz, ces deux protestants, pères de la philosophie moderne; mais l'art, mais les prestiges, la poésie de l'art resteront toujours à la foi ardente et créatrice. — Si la Réforme était venue cinq cents ans auparavant, nous n'admirerions point tant de