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dura peu. Le professeur n'était pas alors compris comme
il pourrait l'être aujourd'hui.
    SansLongiron,DeLoyn'eutpas resté, cette seconde fois,
plus d'un hiver à Saint-Etienne, et même un hiver c'eut été
beaucoup; si la plus complaisante amitié ne s'était pas pliée
à toutes les exigences de cette pauvre nature d'homme,
à coup sûr, il se serait encore jeté â travers champs; puis-
qu'il était, comme on l'a vu, du genre de l'oiseau qui ne
pose qu'un pied sur le sol où s'abattent ses ailes. Mais
tant d'attentions, tant de marques d'attachement faisaient
contrepoids à cet irrésistible penchant de pérégrinité,
d'émigration continuelle.
    Cependant ce domicile auquel on voulait le lier, ce droit
de cité, de bourgeoisie dont on cherchait à l'enlacer, était
une entrave contre laquelle on voyait bien qu'il se roi-
dissait. C'était une camisole de force, une chaîne de fer qui
lui pesait, qui lui faisait mal. On ccmprenait bien qu'il
avait pris, une fois pour toutes, la résolution d'en finir
avec ses voyages; mais aussi cet état de stabilité qu'il s'é-
tait promis, devenantun état contre nature, le soumettait
à un combat où il y allait nécessairement de sa vie.
    Déjà cette lutte inégale se manifestait par une agitation,
un trouble désordonnés, pas des courses répétées, sans but,
mais seulement de huit à dix lieues à la ronde, c'était là sa
prison, sa cage de fer, le ban, qu'au nom de l'amitié, il
avait probablement juré de ne jamais rompre.
    Cet espace de dix lieues devenait pour tout autre un
vaste univers. Pour lui ce n'était plus qu'un cachot, sans
soleil, sans air, enfin une tombe entr'ouverte. Et ce quel-
que chose d'étrange, dont parle M. Aimé Royet, dans son
excellent article nécrologique, s'explique par la continu-
 elle violence qu'il se faisait. « Car enfin, c'était, à ce que
 rapporte M. Royet, c'était, les derniers temps, une exci-
 tation de tête, une agitation de corps, un besoin de mou-
 vement insatiable, une puissance de locomotion inouïe.
 On avait vu De Loy parlant seul, de nuit, par la campagne.