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pascal et sa prière du malin ; car, pour les vers lihophaliques,
on ne me persuadera jamais que la même main ait écritjcetle
pièce et la Moselle.
  La foi chrétienne elle-même était impuissante alors pour
créer un poète. Elle eût fait d'Ausone un théologien comme
Paulin son élève. Le christianisme sentait le besoin de s'enra-
ciner avant de fleurir; ii ne pouvait devenir une poésie qu'a-
près avoir été une religion; car ce qu'il y a d'inspirateur en
lui, ce ne sont pas les dogmes, c'est le sentiment; c'est l'esprit
et non la lettre. Le Christ l'avait bien dit, et c'est vrai dans la
poésie comme dans la morale : la lettre tue ; c'est l'esprit qui
vivifie.


                               VI.

            SENTIMENT DE LÀ NATURE DEVENU STEBILE.


   Le sentiment vif de la nature, celte autre religion du cœur,
ue régnait guère chez les hommes de lettres du IVe siècle.
Leur goût, émoussé par une civilisation corrompue, n'était
plus susceptible des impressions naïves. Le frottement d'une
vieille société avait terni la fraîcheur, usé le velouté de leur
ame. Ne demandez pas à Àusone ce que la nature a de grand
et de simple. Ne lui dites pas d'aller s'asseoir tristement sur la
montagne, à l'ombre du vieux chêne, au coucher du soleil; d'en-
tendre gronder le fleuve aux vagues écumantes, qui serpente et
s'enfonce en un lointain obscur, et de contempler le lac immo-
bile étendant ses eaux dormantes où l'étoile du soir se lève dans
l'azur. Il vous mènerait au bord de la Moselle, et vous ferait
observer, au fond du fleuve, le sable qui se ride sous le flot,
l'herbe qui s'incline et tremble, le caillou qui se cache et étincelle
tour à tour, la mousse et le gravier qui s'unissent pour former
un brillant tapis. A l'endroit où la rivière baigne les pieds
 d'une colline, il vous montrerait les flots qui semblent se cou-