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252 moins paraît l'établir le post-scriptum d'une leltre de d'À- lembert à Bourgelat, en date du 30 janvier 1755. Déjà réputé par son savoir et connu par ses écrits, il ne pouvait larder à trouver place à l'Académie ; les portes lui en furent ouvertes en 1763.11 justifia plus tard cet honneur par l'hommage de nombreux tributs ; nul d'ailleurs n'en était plus digne : il lisait toutes les langues de l'Europe, professait la physique avec distinction, et pouvait être compté au nom- bre des mathématiciens habiles et surtout des naturalistes distingués dont Lyon possédait alors un assez grand nombre. Combien de fois, seul ou avec ceux dont les goûts étaient sympathiques, n'avait-il pas parcouru nos plaines si riches et si variées, nos montagnes si intéressantes, pour leur dérober les nombreuses espèces de plantes qu'elles voient éclore ? quelquefois ces excursions se prolongeaient au delà des limites du Lyonnais. Un jour, entre plusieurs de ces amis de Flore, fut arrêtée une herborisation à la Grande Char- treuse. L'abbé Castiglion, grand vicaire de M. de Monlazet, Le Clerc de la Colombière, Latourelle, Tissier et quelques autres composaient cette caravane, dirigée par le docteur Gi- libert. Après avoir parcouru dans tous les sens le désert de St. Bruno, ces naturalistes prirent la route du Sappey et descendirent à Grenoble, ayant sous le bras, dans de volu- mineux portefeuilles, les richesses végétales dont ils avaient fait la conquête. Le nombre de ces voyageurs, la singula- rité de leur costume, ces sortes de registres dont ils étaient chargés, tout contribua à aiguilloner la curiosité des habi- tants de l'ancien Cularo et à mettre leur imagination en travail. On était alors à cette époque où le chancelier Mau- peou essayait son fameux coup d'état : on prit nos inconnus pour des huissiers de la cour venant instrumenter contre le parlement delà province, et,le soir, ils furent hués au spec- tacle où ils s'étaient rendus. Quelques mots d'explication suffirent pour tirer d'erreur le peuple grenoblois : des ex- cuses furent faites à nos savants ; ils ne tardèrent pas à rire