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21 par ses grâces ; il y a long-temps que la pléiade lyonnaise a disparu du firmament poétique. Fourvières , la côte des Ca- pucins , où fleurit la Condition des Soies , les hauteurs de la Croix-Rousse et de Saint-Just où la fabrique a son quartier- général, ce sont là les collines célèbres du pays, tout le monde vous les indiquera; mais le mont Parnasse, allez-en demander des nouvelles ! On ne connaît que le mont Pila, ba- romètre de la contrée , qui annonce la pluie quand il met son bonnet de nuages. Ob ! j'ai grand tort, sans doute ; je manque de patriotisme, je le sens ; mais je n'aimè pas Lyon. Je le quittai, il y a vingt- cinq ans, me promettant bien de n'y point retourner chercher une carrière , si la mienne venait jamais à me manquer ; et je me suis tenu parole. J'ai préféré subir l'épreuve terrible des mauvais jours à Paris, quand je pouvais trouver une existence matérielle, facile à Lyon. A quinze a n s , l'atmos- phère de la ville marchande , héritière de notre ville littéraire et artiste des XVF et xvua siècles , me pesait déjà ; je vivais mal sous ce ciel tout parfumé des odeurs prosaïques de l'huile aux roquets d'ourdisseuses, des trois-six que le Languedoc envoie par tonnes à Lyon, des-épiceries qui affluent de Mar- seille entre le pont Yolant et le pont de Pierre; et chaque fois que j'y suis passé , une incroyable tristesse s'est emparée de moi, impression fâcheuse que j'ai sérieusement combattue sans avoir pu en triompher. J'ai encore des amis à Lyon qui savent mon antipathie pour mon pays et qui me la pardonnent. A notre arrivée , ils me firent un accueil bon et prévenant, bien capable de me guérir de ce malaise dont j'ai toujours été pris à la porte de Serin ou à la GuilloLière. Je dus à l'un d'eux et à son aimable et spirituelle femme de passer une des plus agréables soirées. Je jouis chez le docteur Dupasquier, avec la conversation d'hommes instruits , de ce laisser aller de bon goût, de ce sans façon plein d'agrément, introuvables en province , si ce n'est dans quelques maisons heureuses où l'amour des arts a