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31 n'était pas de son intérêt de se mettre à la tête du parti à la place de son frère, par les dangers auxquels il s'exposait, au lieu qu'il devait s'attendre à de grands avantages en restant fidèle au roi. Le duc de Mayenne était dans ce moment maître de son sort, mais soit l'ambition , la vengeance et la défiance, l'ayant em- porté sur les autres motifs , il ne leur découvrit point ses intentions , et les con- gédia. La crainte qu'il eut qu'on ne formât quelques entreprises sur sa personne , l'obligea à sortir de Lyon le même jour. Il alla droit à Mâcon , ensuite à .Châlons où il s'assura de la citadelle , et de là se rendit à Dijon. Le duc de Mayenne fut heureux d'avoir fait une prompte retraite , car le co- lonel Alphonse d'Ornano arriva à Lyon quelques heures après qu'il en fut parti, le roi l'ayant dépéché le même jour que te duc de Guise fut tué, pour s'assurer dé sa personne. Ce coup de parti manqué causa un extrême déplaisir au roi. Les nouvelle de la catastrophe de Blois se répandirent dans la ville ce même jour ; la surprise qu'elles y causèrent fut générale : les promoteurs de la ligue sur- tout ne purent cacher leur étonnement, ni dissimuler l'embarras où les jeta ce contretemps. Ils croyaient les affaires désespérées, lorsque de secondes nouvelles qui survinrent depuis les premières , relevèrent leur courage abattu. La révolte de la capitale et des principales villes du royaume , et les avis qu'on recevait de jour à autre , des excès auxquels le peuple de Paris se livra, les enhardit à se déclarer publiquement. Etienne de la Barge, archidiacre et comte de Lyon, vicaire-général de l'ar- chevêque , qui avait épousé avec chaleur les passions de son prélat, était à la tête du parti dans cette ville ; — l'emprisonnement de l'archevêque lui tenant extrêmement au cœur, il ordonna des prières publiques pour obtenir de Dieu son élargîssemeut et celui des autres princes que le roi retenait prisonniers, comme aussi pour le repos de l'aine des deux frères. Cette démarche ne fut point approu- vée par les fidèles serviteurs du roi, qui, malgré les plus pressantes sollicitations, ne purent jamais le faire changer de résolution; le pouvoir absolu qu'il avait quant au spirituel ayant rangé de son côté le clergé séculier et régulier ; la reli- gion fut d'abord mise en jeu comme un puissant ressort seul capable d'ébranler tous les autres; on fit retentir les chaires du péril prochain qui la menaçait d'une ruine entière. Les Lyonnais, pris du côté de la religion, furent entièrement dé- sarmés et restèrent sans défense; c'était les attaquer par l'endroit sensible ; le souvenir des malheurs dans lesquels ils avaient vu leur ville plongée vingt-sept ans auparavant leur étaient encore présens, et la désolation qu'ils avaient ressen- tie de la part de ses ennemis ayant renouvelé leur crainte, ils se déterminèrent à accepter le parti qu'on leur proposait comme l'unique moyen pour s'en garantir. Peudant ce désordre et cette conspiration générale, les zélés serviteurs du roi redoublèrent leur courage et représentèrent avec vigueur qu'on devait mettre en pratique les sages avis que Mandelot leur avait donnés avant sa mort , et qu'en les exécutant on n'avait rien à craindre de tout ce qu'on s'efforçait de persuader