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\ 20 5pays distribués par paroisse, de s'y rendre, et pour l'accélérer encore plus, on donna aux maçons de la ville un prix fait pour démolir les bastions et (es autres ouvrages de maçonneries; elle fut enfin si bien rasée qu'on ne saurait aujourd'hui en apercevoir une trace ( I ) . Je ne peux dissimuler, par cette entreprise hardie, que Mandelot parut démentir la conduite qu'il avait tenue jusqu'alors ; car on ne peut, sans se vouloir faire illusion à soi-même, ne pas apercevoir que le prin- cipal et même l'unique motif qui l'y porta fut son intérêt personnel. II est vrai que ses intentions n'avaient rien de criminel, et qu'il regardait cette citadelle comme inutile alors, et pensait qu'elle nuisait même plus à la liberté du com- merce qu'elle n'était utile au service du roi; mais enfin ces considérations seules ne l'auraient pas emportées dans son esprit, si la crainte de perdre son gouver- nement et d'être réduit à la discrétion d'un ennemi aussi redoutable que le duc d'Epernon ne l'eut vivement ébranlé. Le roi ne prit pas le change lorsqu'on s'ef- força, par les raisons alléguées ci-devant, de lui prouver la droiture des intentions qu'on avait eues; il en pénétra aisément le vrai, mais il rendit en même temps justice à Mandelot dont il connaissait la fidélité et l'attachement à sa personne , qualité rare alors où la ligue commençait à détacher un grand nombre de sujets considérables du service du roi. S'il était permis de juger par un seul trait de l'exac- titude d'un historien, que devrait-on penser de celle de Maimbourg, qui, dans un de ses meilleurs ouvrages ( Hist. de la Ligue, liv. I. ) , rappelle le fait qui vient d'être détaillé en ces termes : « Le duc de Guise s'empara de Lyon même par les soldats du capitaine Le « Passage que le duc d'Epernon y avait mis, et qui étant corrompus par les émis- « saires des Guises, en chassèrent leur commandant qui tenait la citadelle, qu'eux- mêmes démolirent et se déclarèrent hautement pour la Ligue. » On ne peut ren- fermer plus de bévues dans un si court espace; mais rien ne doit surprendre dans cet écrivain qui avait le talent de donner à l'histoire l'air du roman. Il se présente là -dessus une réflexion qui vient assez naturellement et qui porte à examiner si la citadelle, qui paraissait inutile dans le temps dont nous parlons, serait devenue nécessaire quelques années ensuite pour conserver la ville sous l'obéissance royale : la question parait aisée à décider, et la suite de la narration ne prouvera que trop qu'elle n'aurait pas empêché la révolte et qu'elle aurait pu retarder le retour à l'obéissance. Le duc d'Epernon, en septembre de l'anné suivante (1S86), donna encore une alarme à Mandelot ; ce favori à qui le roi ne refusait aucune grâce obtint le gouver- nement de Provence, vacant par la mort du grand prieur, il se mit en chemin pour aller en prendre possession, accompagné d'un nombre considérable de ca- valerie et d'infanterie; il fallait qu'il passa nécessairement par la ville de Lyon, ( l ) Cette citadelle était située au dessus de le rue Neyret ; il n'est point vrai , comme on l'a dit dans quelques INDICATEURS, que le roi Henri III ait donné le terrain qu'elle occupait pour y construire l'église et le couvent des Chartreux. ( NOTE DES ÉDITEURS ).