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19 Mandelot avait eu la précautioû d'envoyer dès la veille un conseiller du présidiat pour le prier de vouloir se rendre de grand matin chez lui, où il voulait lui communiquer quelques dépêches qu'il avait reçues de la cour; le gouverneur s'étant assuré de sa personne, monta à cheval et se rendit dans la citadelle pour empêcher qu'il n'y survint aucun désordre ; dans le moment, et par son ordre , tous les habitans se mirent sous les armes, attendant quelle en serait l'issue ; mais n'y ayant eu aucune résistance de la part des soldats qui étaient en garnison, lesquels ayant passé la nuit à veiller s'étaient allés coucher, la bourgeoisie se relira. La femme du commandaut, qui y était, demanda à être conduite avec son train et ses bardes au monastère de l'abbaye royale de St-Pierre, ce qui lui fut accordé. La garnison, renvoyée avec ses armes et bagages, se retira où bon lui sembla, et le commandant retourna en Dauphiné. Le gouverneur et les éclievins, après cette paisible exécution, informèrent le roi du succès de celte affaire : il en fut fort offensé. Le duc d'Epernou, qui vit par là toutes ses espérances évanouies, exagéra l'énormité de l'attentat, et l'ai- grit le plus qu'il put contre Mandelot et les échevius. Par un cas heureux, An- toine Grollier, sieur de Servières, pour lors premier éclievin, se trouva à la cour pour d'autres affaires : on lui envoya toutes les instructions nécessaires pour négo- cier un accommodement. Les raisons apparentes qui furent exposées pour autoriser cette action étaient : qu'outre que la citadelle causait une grande dépense, elle interrompait la liberté du commerce, ce qui était assez visible, puisque, depuis sa construction, les foires de Lyon avaient sensiblement diminué, et par consé- quent les douanes avaient souffert de grandes pertes, que ce qu'il en coulait au roi pour la solde et entretien de la garnison entrerait dans ses coffres, et que d'ailleurs cette ville n'avait plus rien à craindre de pareil à ce qui était arrivé, la cause pour laquelle elle avait été construite étant cessée. Toutes ces raisons , exposées avec une espèce de vraisemblance, auraient eu peu de force pour per- suader, si elles n'avaient été soutenues par une promesse que fit le sieur de Servières au nom des éclievins, de payer au roi une somme de quarante mille écus, au moyen de laquelle il obtint des lettres datées de Paris, le 30 mai, en forme de déclaration, qui approuvèrent la prise de la citadelle comme faite poul- ie bien de son service et en ordonnèrent la démolition, dont il fut en même temps expédié commission expresse à Mandelot; les éclievins se chargèrent des trois mille livres de rente annuelle que le roi payait aux propriétaires des places occupées pour la construction de la citadelle. Cette négociation pleinement con- sommée, le sieur de Servières revint dans cette ville avec tous les pouvoirs expédiés en la meilleure forme, ce qui remit le calme dans les esprits. Le gou- verneur ne perdit point de temps pour travailler à la démolition de la citadelle, il y employa d'abord les trente-six Pennons qui furent commandés chacun à sou lour ; mais l'ouvrage n'avançant pas à son gré, il ordonna aux paysans du plat