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SOUVENIRS DU COMTE ARMAND DE S A I N T - P R I E S T 17 Lamballe ; et, bien qu'à l'époque dont je parle, cette affection se fût un peu refroidie, il en restait encore beaucoup dans leurs rap- ports. La reine avait rétabli, en sa faveur, la charge de surinten- dante de sa maison qui était restée vacante depuis la mort de made- moiselle de Glermont, princesse du sang, qui l'avait exercée près de la feue reine, Marie Leczinska. Gela mettait mon père, en sa qualité de ministre de la maison du roi, en rapport avec la prin- cesse de Lamballe, et il allait, de temps à autre, faire un petit travail avec elle comme surintendant. Aux champs Elysées nous trouvions des camarades ; ceux que nous voyions le plus étaient les fils du comte de Ségur qui avait résidé longtemps, en qualité de ministre de France, à la cour de Russie et y avait été distingué par l'impératrice Catherine. Les souvenirs qu'il a laissés, sur cette princesse et sa cour, se distin- guent par la vérité de tout ce qu'ils racontent, comme par la déli- catesse de tout ce qu'ils taisent. Nous voyions aussi, avec eux, les enfants de l'ambassadeur d'Espagne, alors duc de Fernand-Nunez; ils avaient une maison de campagne à Issy où ils nous invitaient souvent. Cependant la Révolution marchait, et le ministère, dont mon père faisait partie, se trouvait sans cesse aux prises avec elle. Mon père était surtout en butte aux attaques de Mirabeau, qui lui en voulait particulièrement, lui attribuant les rares velléités de fer- meté que montrait de temps en temps la cour. Il est à remarquer que cela coïncidait avec le temps où celle-ci se rapprochait du for- midable tribun; comme on le soupçonnait dès lors, et comme la correspondance avec le comte de la Marck, récemment publiée, l'a entièrement dévoilé. Ce Seigneur, de la maison d'Aremberg, était l'intermédiaire de ces négociations qui étaient cachées au ministère du roi ; ce prince l'ayant expressément exigé, on ne peut concevoir par quel motif; et comment pouvaient elles alors aboutir à quelque chose de solide? En effet, dans le même temps où Mirabeau faisait les plus belles promesses de consolider le gouvernement, il les déjouait lui-même par les plus violentes déclarations à la tribune, et par des attaques ouvertes contre le ministère. Ce fut à cette époque qu'il dénonça mon père à l'Assemblée, pour un propos absurde qu'il l'accusait d'avoir tenu à une députation de femmes de JANVIER 1884. — T. VIT. 2