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LES FLAMANDS 591 « Spectacle grandiose et touchant ! Deux cents sociétés, plus de 12.000 hommes, unis dans une même pensée d'hommage et d'amour, venaient saluer la dépouille d'un modeste poète. Les opi- nions les plus opposées, se confondaient en ce sanglot majestueux. Les ennemis d'hier, se donnant la main au-dessus de cette bière. Partout le respect, partout la piété ! Et pourtant — ce n'était pas là un cortège funèbre! G'étaitlà une marche triomphale! Les groupes se succédaient sans cesse, apportant couronnes et guirlandes, se découvrant pieusement. « Tout était mêlé dans cette mer vivante : l'écrivain y coudoyait l'ouvrier, le vieillard, le jeune homme et l'enfant, le dandy, le rude villageois, l'artiste, le philistin détesté! « Manifestation imposante, imposante à un double titre. Elle a prouvé non seulement quelle puissance bienfaisante exerce sur les esprits, le Verbe propre delà patrie, la langue maternelle; elle n'a pas seulement prouvé l'évidence qu'en Flandre aussi on sait apprécier les dons de l'intelligence, elle a donné encore au monde le spectacle d'un peuple, s'affirmant dans sa langue et dans ses caractères distinctifs, 'proclamant même par l'hommage unique rendu à ce mort, sa volonté de reconquérir ses droits indéniables de tout peuple libre, ceux de se voir instruit, jugé, administré, dans sa langue propre. « Les obsèques du 16, c'est la cause flamande remportant le plus éclatant de ses triomphes; c'est la Renaissance d'une popu- lation abandonnée à elle-même, s'inscrivant soudain dans le livre de l'histoire comme un fait certain, acquis; c'est le principe lui- même de cette lutte entreprise par tous les peuples l'Europe contre celui de la centralisation et du nivellement politique, se manifestant plus vivace, plus puissant que jamais. » Après cette page éloquente qui peut paraître suspecte, comme venant d'un intéressé, une conclusion est nécessaire. Je l'emprunte au journal libéral d'Anvers, l'Opinion, du 25 novembre dernier. Il relate un meeting de flamingants occasionné par une opposition violente faite au Conseil communal de Bruxelles contre leur mou- vement, par M. le colonel Allard. Un de nos orateurs, M. VAN DEN BOSCH, constatant qu'à Bruxelles 60.000 habitants ne parlent que le flamand, dit : « On oublie, que