Revue lyonnaise » n°6 ( 1883 ) » pp.240

240                  LA REVUE LYONNAISE
 que je veux répondre. Me supposez-vous capable de l'infamie dont
 on m'accuse ?
    — Nullement, mon cher Guy, nullement, fit-on de toute part.
    — Cependant, Monsieur..., hasarda Labourette.
    — Monsieur, dit Lulleval du ton du plus parfait mépris, je n'ai
aucune explication à vous donner ici. Si vous estimez que je vous
en doive une il ne vous sera point difficile de me trouver ailleurs.
    Et s'adressant à tous :
    — Mon ami que voici, continua-t-il en me désignant, veut bien,
pour cette nuit, me prêter son appartement ; nous y conduisons cette
jeune fille et je donne le démenti le plus formel à qui prétendrait
qu'elle n'y sera pas aussi en sûreté que dans un temple.
    Les femmes, Lucia Martelli et Zoé en tête, voulurent arracher
 Laura qui étreignait le bras de Guy, épuisée et confuse de cette
 scène ; mais ces messieurs, moitié riant et moitié sérieux, les con-
 tinrent. Guy put sortir avec sa protégée et je couvris la retraite.
    Ma voiture attendait à la porte et bientôt nous étions en route ;
 Laura pleurait".
    — Mademoiselle, lui dit Lulleval, pour peu que vous regrettiez
le parti que vous venez de prendre, il est temps encore de vous
ramener chez Lucia ou de vous conduire chez votre sœur.
    — Oh ! non, Monsieur, dit Laura, au contraire, je vous en sup-
plie, ne m'abandonnez pas. Continuez ce que vous avez si bienj si
généreusement commencé. Je me fie à vous, je veux vous croire,
je veux vous obéir. Que dois je faire?
    — Hélas! ma pauvre enfant, soupira Guy, nous ne pouvons
plus grand'chose pour vous. Demain j'aurai quitté Paris, voilà
mon ami qui serait heureux de vous être utile, mais la protection
avouée d'un jeune homme ne pourrait que nuire à une personne de
votre âge. Votre existence matérielle est assurée pour longtemps.
Demain nous aviserons au plus pressé.
   .En ce moment, nous arrivions à ma porLe, et, quelques secondes
après, nous étions installés dans ce cabinet.
    — Mademoiselle, dis-je à Laura, veuillez vous considérer ici
Comme chez vous.'Vous plaît-il que je vous conduise dans ma
chambre? Vous pourriez vous jeter sur mon lit et dormir tant bien
que mal jusqu'à demain.

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