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208                  LA REVUE LYONNAISE
liste des poètes contemporains. « Dans ces dernières années un
grand bruit qui rappelle un peu le titre d'une des pièces de
Shakespeare, s'est fait autour d'un auteur provençal, né à Maillane,
dans les Bouches-du-Rhône. Frédéric Mistral, fils d'un paysan et
qui a eu le bon esprit de jeter sa robe d'avocat aux orties et de
rester dans le village paternel, a écrit trois volumes en vers pro-
vençaux... » Et continuant sur le même ton, l'auteur déclare
s'être étonné beaucoup du succès de Mireille, et appliquant au
provençal le système essayé sur Jasmin, « comme Augustin Thierry
dit-il, qui s'exaltait pour Jasmin dont il ne comprenait pas une
syllabe, Lamartine s'enthouisma pour Mireio et entraîna derrière
lui dans la voie bruyante tout le servum peous des imitateurs. » Ce
n'est d'ailleurs que la plus illustre partie de la critique européenne.
« Au fond, ajoute notre historien, le poème du jeune rimeur de Maillane
est le développement en sept cent quarante-huit strophes de sept vers
des Amours d'une paysanne et d'unvaurien. Le père ne veut pas
du jeune va-nu-pieds, et la nouvelle Estelle qui adore son Nemorin
court demander la protection des saintes, et meurt d'un coup de
soleil, parce que dans la précipitation du départ elle a oublié son
chapeau de paille. » Hélas ! il y a longtemps que M. Mary Lafon
ne doit plus aimer les vers. C'est pour ne pas mentir au vœu de la
dixième année qu'il aura parcouru cette rude carrière.
  Il se croit pourtant obligé, pour être juste, de reconnaître une
beauté dans le poème provençal. Il en cite donc « le meilleur
morceau », le Dépouillement des mûriers:

                  Cantas, cantas, Magnanarello,
                  Car la culido es oantarelio.


   Et le lecteur se rafraîchit à cette poésie naïve, écourtée â dessein
pourtant, à cause « du rythme monotone des strophes ». Jusqu'ici
nous n'avons qu'à citer sans songer même au commentaire, pour
trouver l'homme. Mais voici qu'il ne résiste plus. Son éloge était
donc forcé. « Gomme on le voit, c'est l'éternelle histoire du
berger et de la bergère, bien vieille depuis Théocrite, et jetée cette
fois dans le cadre du réalisme rural. » Et il se met à préférer à
Mireille l'antique Daphnis et Chloé pour son élégance exquise.