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          NOUVEAUX SOUVENIRS DE PONDICHÉRY                          35

   L'aménagement des maisons indiennes se prêterait mal aux
danses des bayadères; aussi est-il d'usage de construire pour
la circonstance avec des planches et des feuilles de cocotier une
sorte de galerie couverte qu'on appelle pandal.
   L'intérieur est orné de guirlandes de tapisserie, de glaces et de
verres multicolores. La fête commence avec la nuit. Les invités
prennent place, les Européens au premier rang. Quand c'est un
mariage qu'on célèbre, le nouvel époux s'assied tout au fond sur un
large trône. L'épouse n'est admise à lui tenir compagnie que si elle
n'est pas encore nubile, ce qui est d'ailleurs le cas le plus fréquent.
La présence d'une femme de haute caste nubile à une cérémonie
publique constituerait une infraction grave aux règles de la bien-
séance indienne.
   L'amphytrion s'approche tour à tour de chaque spectateur, lui
verse sur la tête et sur les mains quelques gouttes d'eau de
senteur, lui passe au cou et au poignet des bracelets de fleurs, et,
sur un signe de lui, l'orchestre joue l'ouverture. Orchestre bizarre,
composé d'une espèce de clarinette, d'une sorte de violon, d'une
façon de tambour et de deux ou trois disques métalliques
qu'on frappe à tour de bras les uns contre les autres. La résultante
de cet assemblage est une mélodie; parente éloignée des mélodies de
l'Opéra, mais originale et provoquante dans son étrangeté. L'effet
qu'elle produit sur l'oreille est à peu près celui que produisent sur
le sens du goût certains fruits verts dont les très jeunes filles sont
généralement friandes. Les exécutants, qu'on appelle Nathouvins,
sont presque tous des bâtards de bayadères, c'est dire qu'il n'y
aurait aucun danger à leur permettre la recherche de leur pater-
nité et qu'ils poursuivraient en vain une preuve perdue dans la
multiplicité des hypothèses.
    Brid'Oison prétendait qu'on est toujours le fils de quelqu'un, il
n'avait pas prévu le cas où on est le fils de quelques-uns.
    Le costume officiel des bayadères est à la fois d'une richesse et
 d'une grâce extrêmes. Sur leurs cheveux noirs aux reflets lustrés,
et dans un enchâssement de fleurs odorantes, brille un petit toquet
 de fils d'or curieusement travaillé. Un corsage de satin pourpre
 fermé par des agrafes de pierreries se moule sur la poitrine. La
 manche très courte n'emprisonne que le haut du bras et laisse le