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                     LA LÉGENDE D'ŒDIPE                            127
dont on retrouve dans Laharpe un écho fidèle, il faut dire que les
trois derniers actes de Voltaire présentent de grandes beautés. La
première scène du quatrième acte, celle de la double confidence,
empruntée à Sophocle, comme il en convient, est, à part quelques
termes ampoulés, versifiée avec énergie et avec élégance. Le débu-
tant s'y trahit par des réminiscences un peu trop fréquentes de
Corneille et de Racine.
   M. Jules Lacroix, avec une modestie que son talent rend plus
grande et plus méritoire, n'a pas essayé de refaire une pièce que
l'antiquité nous a léguée parfaite. La gloire de nous rendre dans
son austère beauté le chef-d'œuvre de Sophocle lui a suffi, et cette
gloire, nul ne saurait la lui. contester. Voici d'ailleurs ce que dit
M. Villemain, dans son rapporta l'Académie française, sur le con-
cours de 1862.
   « h'Œdipe-Roi      de Sophocle, fidèlement traduit, sans change-
ments, sans artifices nouveaux, avec la hardiesse de ses images,
ses intermèdes lyriques mêlés à l'action, avait frappé les esprits,
comme un grand spectacle et une vérité poétique. La faveur que le
public avait témoignée pour cette reprise du théâtre d'Athènes, au
dix-neuvième siècle, paraissait le signe d'un goût plus libre et plus
idéal. Sans doute c'était par la force de l'œuvre primitive que de-
vait surtout s'expliquer le succès. Mais, pour la transmission de
cette œuvre à si lointaine distance et dans un monde si différent, il
fallait qu'un talent d'écrire naturel et passionné eût conservé l'ac -
cent vrai du modèle, que la traduction ainsi représentée fût comme
la voix, en langue vulgaire, de cette poésie grecque tour à tour mé-
lodieuse et terrible. Dans cette tâche difficile, M. Jules Lacroix a
souvent réussi pour le lecteur attentif, comme pour l'auditoire
ému ».
   Il va sans dire que je n'entreprendrai point de raconter aux lec-
teurs de la Revue l'œuvre de Sophocle. Ce que je voudrais essayer
de leur traduire, c'est l'impression qu'on éprouve à la voir repré-
senter. Le rideau se lève et cette foule à genoux, ces fronts cour-
bés, ces mains tendues et suppliantes nous montrent une ville en
deuil. Nous sommes touchés par les paroles nobles et magnanimes
 d'Œdipe, nous le trouvons digne de la confiance que le chœur met
 en lui, nous écoutons, anxieux, Gréon qui rapporte la réponse de