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— 327 — acquitte, si l'on ne trouvait pas dans ses éloges une tournure d'esprit et même une certaine vivacité d'expression qui évoquent, toutes proportions gardées, les productions de notre pléiade du xvie siècle. Il est impossible en le lisant de ne point songer aux vers si joliment rimes et si délicatement ironiques que Pernette du Guillet dédia plus tard à ses concitoyennes : Qui sçauroit comme Veaue de Saône Faict le beau teint aux Damoiselles Tant de peine ne prendraient celles A distiller pour se noircir (Je voulois dire a s'esclaircir) Leur blanche et délicate peau. En réalité, il n'est pas d'époque où la beauté soit exempte de tout arti- fice et notre anonyme nous laisse, lui aussi, entendre que les Lyonnaises de son temps tiraient une partie de leur charme du goût qu'elles apportaient à se vêtir. Jamais l'on ne mit plus de fantaisie dans la mode ni plus de luxe dans la toilette. S'il faut en croire les documents, les femmes de la haute bourgeoisie commerçante se lancèrent éperdument dans la coquetterie et précisément à un moment où les échanges avec l'étranger permettaient de mieux la satisfaire : les pelletiers apportaient d'Allemagne la martre et le petit-gris destinés à border les robes. L'Italie, à la suite de l'échec de la ten- tative de Louis XI pour introduire la fabrique des soieries à Lyon, restait le grand pays producteur des étoffes de satin et de velours. Ciseleurs et or- fèvres rivalisaient sur place pour exécuter, avec un art parfois très délicat, les bijoux, les colliers d'or, les ceintures richement incrustées d'argent qui faisaient maintenant partie intégrante du costume. Les coiffures, au dire de Paradin, qui pouvait encore en juger aux verrières des églises et sur quel- ques anciennes tapisseries, atteignirent à une rare extravagance : « En leurs testes chargèrent certains bourrelets pointus comme clochiers, la plus part de la hauteur de demie aulne, ou trois quartiers, et estoyent nommez par aucuns les grands papillons, parce qu'il y avoit deux larges aisles deçà et delà , comme sont aisles de papillons ; et estoit ce haut bonnet couvert d'un grand crespe traînant jusques en terre, lequel la plus part troussoyent au-