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— 328 — tour de leur bras. Il y en avoit d'autres qui portoient un accoustrument de teste qui estoit partie de drap de laine, partie de drap de soye meslé, et avoit deux cornes, comme deux donjons ; et estoit ceste coiffure découpée et déchiquetée, comme un chapperon d'Allemant ou crespée comme un ventre de veau... Les dames de médiocre maison portoyent des chapperons de drap, faicts de plusieurs larges lais ou bandes entortillées autour de la teste, et deux aisles aux costez, comme deux oreilles d'asne. Il y en avoit aussi d'autres des grandes maisons, qui portoyent des chapperons de veloux noir, de la hauteur d'une couldée, lesquels l'on trouveroit maintenant fort laids et estranges ». Mais notre auteur était bien trop philosophe pour songer à s'en formaliser : « Si ceux de ce temps là , dit-il 1 , voyoyent nos nouvelletez et desguisemens, ils auroyent occasion de s'en mocquer ». Vé- rité d'alors et de toujours. Malheureusement les actuels détenteurs de l'autorité publique n'envi- sageaient pas les choses avec autant de sérénité. L'archevêque, en tant que seigneur temporel, s'efforça par des prescriptions sévères, mais nullement respectées2, de corriger les caprices d'une mode, qui risquait à chaque ins- tant d'amener entre les courtisanes et les femmes honnêtes les plus fâcheu- ses confusions. Nous savons par les registres des délibérations consulaires 3 que les conseillers ne se désintéressaient pas non plus de ces questions en appa- rence frivoles et qu'ils considéraient sans faveur un mouvement qui pou- vait porter atteinte à la réputation de traditionnelle austérité de la ville et donner prise aux abus de la fiscalité royale. On élabora même un très cu- rieux projet de réglementation somptuaire, qui ne fut jamais appliqué. Ainsi les Lyonnaises osaient soutenir la comparaison avec les Parisien- nes. En homme habile, 1' « estrangier notaire » proclame qu'il ne veut point se prononcer. Mais, en dépit de ses précautions oratoires, il lui était bien difficile de ne pas s'attirer une réplique. L'éloge de Paris, composé pour lui répondre, témoigne d'une grande verdeur de langage, renouvelée de Villon, mais d'une originalité médiocre. i. Mémoires de l'histoire de Lyon, pp. 271-272. 2. Arch. départ, du Rhône, G. 179 (Justice temporelle), passim ; Bibl. Nat., ms. latin 10.033, f° 159, v°. 3. Archives municipales de Lyon, BB 17, f° 71.