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pagnie des Indes, il groupe autour de lui « tous ceux dont l'intérêt se com-
bine avec le sien », il compromet ainsi la sécurité de la colonie.
      Ce grief reparaît fréquemment dans le journal et la correspondance
privée de Dumas. Le projet de rétrocession des Mascareignes est pour
lui le fait essentiel autour duquel viennent s'agglomérer tous les autres ;
c'est la cause principale de sa querelle avec Poivre et des batailles qu'il
est obligé de soutenir contre ses partisans. Les amis de Poivre sont ses
ennemis, ou plutôt les ennemis du Roi : fonctionnaires, propriétaires,
membres du Conseil supérieur, syndics et députés de l'île. Et le comman-
dant prend contre eux l'offensive pour le « bien du service » et la gloire
de son prince *.
      Mais le « complot » de la Compagnie des Indes et les démarches que
Dumas attribue à ses ennemis ne suffisent pas à expliquer entièrement
ses dissensions avec Poivre. Les instructions ministérielles rédigées de
façon ambiguë et l'ordonnance qui réglementait la nouvelle administra-
tion des Mascareignes y sont bien pour quelque chose.
      D'après Dupont de Nemours, le gouvernement royal avait pour
principe, aux colonies, de « tenir le pouvoir militaire et le pouvoir civil en
état de brouillerie ouverte. On rappelait... les commandants et les inten-
dants lorsqu'ils se montraient d'accord. On les soutenait alternativement
l'un contre l'autre et on ne les rappelait que l'un après l'autre quand la
dissension était bien établie entre eux »2.
     Poivre ne cachait pas à Dumas que le « principe de sa contrainte »
avec lui résidait dans l'ordonnance concernant le gouvernement civil.
«Il semblait que j'avais dicté cette ordonnance pour me donner toute l'au-
torité... S'il avait su ce qu'elle contient, il ne serait pas parti... Par elle i^
n'était ici que mon commis... S'il fallait me communiquer à chaque ins-
tant tout ce qu'il aurait à faire, il renoncerait plutôt à la besogne. J'ai
répondu que je n'avais pas eu plus connaissance que lui de la législation
établie, mais que je savais qu'elle avait été copiée sur celle de Saint-Do-
mingue et de la Martinique. Il a paru persister dans l'opinion que M. Du-

     i. Journal de M, Dumas, 10 juin 1768.
     2. Dupont de Nemours, Notice sur M. Poivre, 71-73. Sur les querelles entre gouverneurs et intendants
voir P. de Vaissière, Saint-Domingue, in-8°, Paris, 1909, 138 et s.