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munition à sept régiments de l'armée de Catalogne. Leur compte fut apuré,
le 10 mars 1642, par les intendants royaux, MM. de Voyer et de Dorée I .
On sait que ce genre d'opérations est, à la guerre, particulièrement
fructueux et, Ã l'ordinaire, sans trop de risques. A l'instar de beajucoup
d'autres munitionnaires, Benoît Démia recueillit, à ce jeu, malgré le peu de
temps, d'appréciables avantages, car, venu à Bourg l'été suivant pour y
prendre quelques jours de congé, il acheta, le 18 juillet, la belle maison,
« avec jardin devant », que possédait, rue Teynière, l'avocat Philibert Cocon.
C'est là qu'il installa sa famille, avant de se remettre en route pour
l'Espagne, où son protecteur venait d'être nommé (le 25 juin) vice-roi, en
remplacement du maréchal de Brézé, démissionnaire, et, un peu plus tard,
duc de Cardona. Cardona est une petite ville catalane de la province de
Lérida, que ses mines de sel gemme ont rendue célèbre. Démia fut chargé
d'aller prendre possession de ce duché au nom de son maître, qui lui confia
tous ses pouvoirs.
Au mois de janvier 1643, La Mothe-Houdancourt fit son entrée solen-
nelle à Barcelonne. Benoît Démia pensait y trouver, lui aussi, ses quartiers
d'hiver quand, dès les premiers jours de février, il dut reprendre la route de
France.
Le nouveau vice-roi s'était ému des accusations portées contre lui à la
cour par quelques officiers de son armée. Il rédigea, pour se disculper, un
mémoire confidentiel qu'il voulut envoyer à Paris par un messager de
confiance. Son choix se porta sur son secrétaire, et Démia partit aussitôt,
chargé d'une volumineuse correspondance a .
1. En 1644, la disgrâce du maréchal attira une nouvelle vérification des comptes, lesquels furent déclarés
réguliers.
2. Cette expédition de Catalogne devait être funeste au maréchal de la Mothe-Houdancourt. Il se
justifia bien momentanément, mais son principal protecteur, Sublet de Noyers, fut disgracié le 10 avril 1643
et Richelieu était remplacé par Mazarin. Celui-ci fit nommer par Anne d'Autriche, au poste de secrétaire
d'Etat à la guerre, Michel Le Tellier, ennemi déclaré du vice-roi de Catalogne. En 1644, la fortune des
armes abandonne ce dernier : les Espagnols reprennent l'offensive ; La Mothe-Houdancourt perd Mouzon,
est battu, le 15 mai, devant Lérida qui est prise en août. Il est contrain d'abandonner le siège de Tarragone.
« Depuis la conspiration de Cinq-Mars un insuccès en Espagne rend suspect le chef qui y commande. A
Paris, où la nouvelle de la perte de Lérida arrivait le 13 août, le bruit courait, le 18, « que l'on revoquoit le
maréchal de la Mothe, qu'on lui faisoit son procès et qu'on envoyoit à sa place le duc d'Harcourt » (Eug. Vial,
loc. cit., p. 109). Comme il revenait en France, avec de nombreux carrosses et chariots de bagages, et plus de
cent chevaux de bataille tenus en main, il fut arrêté à Lyon « entre la porte et la herse ». On l'emprisonna Ã