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lieu d'effort intellectuel et il est fier des réserves de sa mémoire, comme il
le serait, s'il en était capable, du jet spontané de son invention créatrice.
      Il a eu l'idée heureuse — une fois n'est pas coutume — de figurer sur
l'hémicycle de la Grenette les principales provinces, que regarde du haut
 de la façade la statue de la France entre celles de Catherine et de Marie de
 Médicis. Il ne pouvait sans inconvenance oublier les ancêtres de la nou-
velle reine, et, en effet, il a placé, dans douze niches du berceau de verdure
du Pont de Saône, les douze Médicis les plus illustres, que Christophe
 de La Haye a portraiturés « en bronze sur toile », dans un cadre blanc
et noir. Il invoque même Béatrice comme prototype de Marie de Médicis ;
c'est assez dire que la divine amante de l'immortel poète n'est pour lui
qu'un nom.
      Bon chrétien et même ardent catholique — un ancien ligueur, — il est
comme la plupart des esprits de ce temps, en art et en littérature, tout
païen. Il ne lui est pas venu à l'esprit, en face de Saint-Nizier, la plus
vieille église de Lyon, dont la cloche sonnait au Moyen Age les réunions
 du Consulat, la cathédrale municipale, comme on pourrait dire, d'évo-
quer, en quelque façon que ce fût, le souvenir de la foi et des libertés
lyonnaises. Son Portail est une copie en bois de charpente mal dissimulé
des arcs de triomphe de marbre de la Rome impériale. Il a une telle supers-
tition de ce très lointain passé qu'il en perd le sens du présent et oublie
de qui il parle et à qui il parle. A l'arc de triomphe de la Porte-Froc, où
finissait la ville des bourgeois et commençait celle des clercs, il avait
accumulé les trouvailles symboliques. Il est assez naturel que les inscrip-
tions reparlent du soleil Henri IV et de l'aiglonne Marie de Médicis, seule
capable, par métaphore, de le regarder en face, ou encore de la lumière
« toute claire et toute pure » que les rayons de l'astre allument à travers
une coupe de cristal ; mais que dire, à l'entrée du cloître, de la statue de la
Fécondité, ayant autour d'elle trois enfants « comme elle se voit en quel-
ques médailles » et, à ses pieds, un lièvre, « qui a toujours été, dit Matthieu,
hiéroglyphe d'elle », car il est le seul de tous les animaux qui ait des petits
tous les mois. Et je ne cite pas tout.
      Pour un ménage à deux, qui s'annonçait comme un ménage à trois,
la statue de la Concorde offrait un sens équivoque ; en tout cas, il n'eût