page suivante »
— 95 —
Et cette furieuse diatribe était signée de noms qu'il vaut mieux taire.
Pendant qu'on le desservait ainsi sans mesure auprès du Directoire,
Montchoisy veillait sans relâche aux devoirs de ses fonctions. Sur pied nuit
et jour, il assurait à lui seul — au défaut des administrateurs impuissants ou
hostiles — la police de la ville. La garnison ne se composait alors que de
quinze cents hommes d'infanterie, de quelques artilleurs et de cent cin-
quante cavaliers, officiers d'état-major, dragons ou chasseurs. Le général
Kellermann, commandant en chef de l'armée des Alpes, venait encore d'en
prescrire la réduction en demandant l'envoi d'un bataillon de quatre cents
hommes, celui commandé par Hagaert. Que faire avec cela contre la popu-
lation, en grande partie armée, d'une ville en effervescence ? Que serait-il
advenu si le général n'avait pas tenu, le I er prairial, en prévenant l'effusion
du sang, la conduite dont ses adversaires lui faisaient un crime ? Grâce à son
ascendant, à sa vigilance, il réussissait cependant à maintenir un ordre
relatif, les quelques menus incidents que les délateurs transformaient en
assassinats dans leur adresse au Directoire n'influant en aucune façon sur
l'état général de la cité.
Quoique obligé de déférer aux ordres de Kellermann, en faisant partir
un contingent pour les Alpes, Montchoisy suppliait son chef de lui envoyer
d'autres troupes. Il demandait au Ministre de la police les fonds nécessaires
à l'éclairage des rues. Il prenait deux arrêtés prescrivant des mesures sévè-
res de police : interdiction de la vente et du port des cannes à épée, des
poignards, des bâtons ferrés ou plombés ; arrestation de tout individu ren-
contré dans les rues, sans lumière, après dix heures ; dispersion de tout
rassemblement de plus de trois personnes ; prohibition des chants anti-
républicains ; réglementation des cabarets et des auberges, etc. Enfin,
sachant combien Hagaert était impopulaire à Lyon, il prenait à son égard
des mesures de protection dont nous allons voir comment celui-ci lui sut
gré.
Cet officier devait partir avec le bataillon réclamé par Kellermann *.
Dès le 2 prairial, Montchoisy s'occupait de sa sécurité de la façon la plus
i. Paul Cayre, dans une lettre du 7 prairial, parle en ces termes de ce bataillon. « Le 3 e bataillon de la
e
60 demi-brigade, dont Hagaert est le chef, corrompu en partie par les terroristes, etc.. »