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bienveillante. Mais, à peine arrivé à Chambéry, Hagaert s'empressait
d'écrire à son protecteur Reverchon, qui communiqua sa lettre à Louvet.
La Sentinelle la reproduisit dans son numéro du 19 prairial. Elle débute en
ces termes emphatiques : « La prescription, l'exil ou la mort seraient-ils
donc réservés à tous ceux qui sont employés à Lyon par le gouvernement
pour exécuter les lois ? ». L'écrivain énumère ensuite toutes les complai-
sances qu'il attribue à Montchoisy pour les contre-révolutionnaires et les
ridicules menus faits qu'il considère comme étant, de sa part, des persécu-
tions contre les « Mathevons », ses amis. Puis il entreprend de faire à sa
façon le récit des événements du I er prairial. A partir d'ici, sa lettre est Ã
transcrire, car il semble bien que, communiquée au Directoire, elle contri-
bua à faire prendre la mesure de rigueur qui frappa Montchoisy.
« J'étois dans les casernes, au « Bleu-Céleste », — dit-il — lorsqu'on
me fit avertir qu'il y avoit un rassemblement considérable sur la place des
Terreaux qui vouloit entrer dans la maison commune ; je donne aussitôt
ordre à Rencureau, adjudant-major du bataillon, d'aller voir ce qui se passe
et de m'en rendre compte. Il part de suite, rencontre deux officiers du
corps ; tous trois ensemble vont à la maison commune. Arrivés à dix pas de
l'escalier, en présence du général Montchoisy, qui les péroroit et promettoit
justice, il reçut plusieurs coups de bâton sur la tête et une balle de pistolet
dans le dos. L'on vient m'avertir, ainsi que toute la garnison, que Rancu-
reau a été assassiné ; aussitôt tout le monde court aux armes et se range en
bataille dans la caserne. L'ordre arrive pour un détachement de 300 hom-
mes ; ils veulent tous marcher et me suivent. J'arrive dans le dessein de
cerner la place, dans laquelle tous les déserteurs, émigrés, réquisitionnaires
et assommeurs me paraissent réunis. Aussitôt, le général Montchoisy, sur
les cris de ces effrénés qu'ils iroient sur les toits pour assommer la troupe si
elle ne partoit, avec promesse de se retirer aussitôt que la troupe seroit par-
tie, donna ordre de retourner à la caserne. Cependant les défenseurs de la
patrie étoient hués et insultés par ces effrénés, tandis que les applaudisse-
ments de toute part et des cris bravo général, faisoient retentir les airs ! La
troupe étant à peine arrivée dans les casernes, des patriotes accourent pour
nous annoncer les assommages de différents patriotes, entr'autres d'un
agent de police. Je consigne la troupe et donne les ordres de se tenir prêts Ã