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en hébergeant les deux voyageurs que, si loin des boulevards que la for-
june et l'ambition de Napoléon l'aient transporté, il tenait à conserver toutes
les traditions de la meilleure société ; l'ambassadeur Alquier fut parfait de
ton et de sympathie.
      C'est dans la capitale des Etats du Saint-Siège que nos touristes prirent
leurs quartiers d'hiver ; nulle part ils ne firent un plus long séjour, aussi
plein d'intérêt et de souvenirs • ces trois mois de plaisir furent les plus
beaux de leur lune de miel. Ils ne rencontrèrent nulle part, pas même au
Quirinal et dans l'audience de Pie VII, les ombrageuses défiances, les sour-
des vexations dont le monde est si adroit pour empoisonner ses plus dé-
monstratives politesses. A Rome, la civilisation, imprégnée de sagesse et
d'expérience, s'est dépouillée de trop encombrants préjugés et nourrit peu
d'incorrigibles préventions ; on n'a pas deux poids et deux mesures, réser-
vées aux filles d'Eve, qu'elles aient été faibles, comme leur mère, à l'aspect
du fruit défendu, ou bien qu'elles aient toujours fermé l'oreille aux sugges-
tions malignes du serpent. Il n'est pas douteux que M. et M m e Caraman-
Chimay goûtèrent avec délices cette reposante liberté de jugement et en
usèrent ; les meilleures maisons, les plus fermées, s'ouvrirent à leurs désirs ;
plus charmés par les concerts, les jeux du théâtre, que férus d'archéologie,
ils fréquentaient plus souvent les salles de spectacles que les catacombes et,
si on les rencontra au Colysée et à Saint-Pierre, ils préféraient les allées du
Pincio et la promenade du Corso aux ruines du Forum et aux Thermes de
Dioclétien. J'ignore si, possesseur d'un passeport régulier, dont il lui était
nécessaire de demander le visa à l'ambassade, l'héritier du prince présenta
au cardinal Fesch quelque recommandation considérable, mais sa femme et
lui furent accueillis par le ministre plénipotentiaire français avec un empres-
sement peu commun ; ils reçurent plusieurs invitations à ses réceptions de
gala et en particulier ils prirent part à la fête splendide, organisée le lundi
7 janvier 1806, pour célébrer la signature du traité de paix de Presbourg,
conclu douze jours plus tôt. Le matin, dans l'église Saint-Louis, Son
Eminence avait présidé un office solennel et le chant du Te Deum; il s'y
était transporté en grand cortège dans le plus pompeux apparat. A 7 heures
du soir, il offrait une audition musicale et à souper, à une assemblée
de plus de 300 personnes, selon ses propres confidences à sa sœur