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L'ÉCOLE LYONNAISK 173 en les revoyant depuis, je n'y cherchois autre chose qu'un honneste passe temps et moyen de fuir oisiveté... Mais depuis que quelcuns de mes amis ont trouvé moyen de les lire sans que j'en susse rien, et que ils m'ont fait croire que je les devois mettre en lumière, je n'ai osé les éconduire; » et d'autres indices nous permettent de reporter la date de ces jeunesses aux environs de 15 50 ou 1549. La liste en est courte : trois Elégies; vingt-quatre Sonnets, dont un en langue italienne ; et le dialogue intitulé : Débat de folie et d'amour. Le Débat, qu'il faut rapprocher du Conte du Ros- signol, 1547, que l'on attribue quelquefois à l'imprimeur Gilles Corrozet, offre cette particularité que, dans une forme ou dans un cadre qui sent encore son moyen âge, Débats, Dits et Disputes, on le croirait traduit de l'antique ; et cependant il semble bien être de l'invention de Louise Labé. On en connaît la conclusion devenue proverbiale : la Folie ayant aveuglé l'Amour, celui-ci se plaint à Jupiter, et le roi des dieux rend entre eux cette sentence : Pour la difficulté et importance de vos différens et diversité d'opi- nions, nous avons remis votre affaire à trois fois, sept, fois, neuf siècles, — remarquons ce choix dénombres et rappelons-nous les combinaisons de Délie ; — et cependant vous commandons de vivre amiablement ensemble sans vous outrager l'un l'autre. Et guidera Folie l'aveugle Amour, et le conduira partout ou bon lui semblera. Et sur la restitution de ses yeux, après en avoir parlé aux Parques, en sera ordonné. Les Grecs eux-mêmes ont-ils inventé de plus joli mythe ? Mais ce sont surtout trois ou quatre sonnets qui ont per- pétué le nom de la Belle Cordière. Il n'en faut pas davan- tage à un poète pour s'inscrire à jamais dans l'histoire d'une littérature! et quand ce poète est une femme, et une femme qui aime, je ne sais s'il ne suffirait pas d'un seul.