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                  LES PÈLERINS DE BRETAGNE                   283

Théodomir, évêque d'Uria, fut transféré à Santiago en
835. Or, on est, à cette date, en plein christianisme, à
une époque historique relativement rapprochée, et on
s'explique difficilement que les pèlerins de la Bretagne soient
venus passer par le Lyonnais et les Cévennes pour se rendre
à Santiago ; le chemin le plus court était certainement celui
qui aurait suivi les côtes de l'Océan; cette route, plus ou
moins bonne, existait certainement.
   Pourquoi les pèlerins chrétiens, au lieu d'abréger le tra-
jet, l'allongeaient-ils d'une façon si insolite et si démesurée.
   Et, d'abord, les pèlerins de la Bretagne passaient-ils réel-
lement par la ligne de faîte qui contourne les sources de la
Loire et de la Garonne ? Sur ce point, nous n'avons aucune
preuve, mais seulement le dire des paysans de Chatanay;
quelle valeur peut avoir ce dire ? C'est, il est vrai, une tra-
dition locale ; une tradition vaut mieux qu'une légende, la
légende peut être une invention née dans le cerveau d'un
inventeur ; on n'invente pas une tradition ; elle se transmet,
sur place, et n'est point un article d'importation.
   Restait néanmoins cette question : « Pourquoi les pèle-
rins chrétiens suivaient-ils les lignes de faîte à travers la
France jusqu'au pic de Cortelo dans les Pyrénées, non loin
de la Méditerranée, pour, de là, se rendre à Santiago, en
suivant le versant nord de la chaîne des grandes Pyrénées
et les monts Cantabres, au lieu de suivre le littoral de l'Océan ?
   On doit d'abord reconnaître que la route, le long du
littoral de l'Océan, pendant les temps féodaux, devait être
bien défectueuse et bien irrégulière, cependant, la difficulté
de circulation depuis la Bretagne jusqu'à la Bidassoa, par
une route rapprochée du littoral, ne suffirait pas à elle seule
à expliquer le trajet par les lignes de faîte; il fallait un
motif autrement puissant pour justifier ce choix ; il fallait une