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SAINT NtZIER 87 plongée dans les plus affreuses angoisses, elle invoque le crédit de saint Martin. Depuis deux jours l'enfant était sans regard et sans voix, la pauvre femme songeait aux apprêts funèbres, lorsque tout à coup l'agonisant ouvre les yeux et réclame sa présence. Elle accourt. « Que me veux-tu, mon fils, demande-t-elle. Cessez de craindre-, lui répondit- il ; le bienheureux Martin a tracé sur mon visage le signe de la croix et il m'a ordonné de me lever. » A ces mots il s'élance hors de sa couche; tout malaise a disparu. Il lui resta néanmoins sur la joue une cicatrice, comme témoi- gnage du danger qu'il avait couru et de l'opportune inter- vention qui l'en avait délivré. Cependant l'heure des leçons sérieuses approchait et l'avenir présageait trop de grandeur et de fortune au fils, pour que la mère ne jugeât pas indispensables, et le plus tôt possible, une discipline rigoureuse et une instruction éten- due. Le portrait que Grégoire de Tours, son arrière-petit- fils, nous a tracé de cette patricienne distinguée, nous la montre non moins dévouée que vigilante, unissant dans sa maison l'ordre et l'activité, très résolue à ne pas sacrifier la moindre parcelle d'une autorité qui était, entre ses mains, aussi ferme qu'absolue. Frappée par un veuvage préma- turé, elle suppléa à l'absence du chef de famille, et dans ses immenses exploitations agricoles; comme dans son intérieur, tout marcha sous l'impulsion de sa haute intelli- gence et de sa décisive volonté. Mais il semble que Nizier ait obtenu, sur son frère et sur sa sœur plus âgés, une part privilégiée de sollicitude, quelques marques plus sensibles de cette tendresse si éveillée et si respectueusement nourrie. Que de fois, le long des siècles, nous apercevons ainsi l'âme des saints les plus originaux tenir d'une mère,