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SOUS LE PREMIER EMPIRE 227 entrer dans ce château, où son arrivée était toujours une fête. Elle partit dès le lendemain, ce fut en vain : le funeste exil la frappa- » M. Récamier lui-même eut la mission pénible de notifier à sa femme cet acte d'odieuse persécution. Il le fit d'ailleurs sans se départir de la modération qui constituait le fond de son caractère et qui ne l'abandonnait jamais, même dans les circonstances les plus tragiques; nous allons en juger : Paris, 3 septembre 1811. « Tu sais, ma chère amie (6), que je ne retrouve pas toujours cette fermeté de caractère que j'admire dans cer- tains hommes, mais que malheureusement on ne se donne pas. J'en ai éprouvé assez peu pour m'inquiéter et m'alar- mer beaucoup dimanche matin à dix heures, en recevant une injonction du Conseiller d'État, Préfet de police, de me rendre le lendemain à midi dans son cabinet, pour affaire urgente qui me concerne. Quoique la lettre qui portait cette invitation fût écrite en termes fort honnêtes, elle me tracassa infiniment le jour, la nuit; et le lendemain je fus fort exact à l'heure. — On me fit entrer de suite dans le cabinet du Préfet qui vint à moi et me dit : — J'ai bien du regret de devoir être chargé auprès de vous d'une com- munication désagréable; il est question de Mme Récamier, j'ai l'ordre de l'Empereur, — il le tenait à la main, — de lui signifier celui de se retirer à quaraate lieues de Paris. J'ai cru devoir vous prier de venir chez moi pour vous en ins- truire particulièrement et sans faire passer cette signification (6) Mmc Récamier et ses amis, p. 74.