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                    SOUS LE PREMIER EMPIRE               115

la première en 1803, la seconde en 1808, la troisième en
1811, viennent tour à tour, ensemble quand elles le
peuvent, chercher un abri dans nos murs.
   Exilées! Comprenons-nous bien toute la portée de ce
mot ?

   « On s'étonnera peut-être, dit Mme de Staël (2), que je
compare l'exil à la mort ! Mais de grands hommes de
l'antiquité et des temps modernes ont succombé à cette
peine. On rencontre plus de braves contre l'échafaud que
contre la perte de la patrie. Dans tous les codes de lois, le
bannissement perpétuel est considéré comme une des
peines les plus sévères ; et le caprice d'un homme inflige
en France, en se jouant, ce que des juges consciencieux
n'imposent qu'à regret à des criminels. »


  Et la cause de cet exil? Napoléon va nous la révéler lui-
même. Ecoutons sa conversation avec Auguste de Staël.
  Le cadre est pittoresque : l'Empereur achève un rapide
déjeuner dans une auberge de Chambéry ; on introduit le
solliciteur.


   « D'où venez-vous ? lui demande Napoléon d'un ton
impératif.
   « — Sire, de Genève.
   a •— Où est votre mère ?
   « — Elle est à Vienne, ou près d'y arriver.
   « — Eh bien ! Elle est bien là ; elle doit être contente ;
elle va apprendre l'allemand. Votre mère n'est pas


  (2) Dix années d'exil, p . 258.