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II4 UNE PAGE DE LA VIE LYONNAISE
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Oublions que nous sommes à la fin du xixc siècle ;
chassons de nos oreilles le mugissement de ces tramways
électriques qui, semblables aux bêtes de l'Apocalypse,
passent à la porte de nos demeures en ébranlant le sol ;
détournons nos yeux des projections lumineuses et aveu-
glantes de la tour métallique ; effaçons de notre souvenir
les sifflements des machines à vapeur, les réclames envahis-
santes, les sons assourdissants des orchestres orientaux, les
cris énervants des marchands de ratakoum et tout ce
brouhaha de l'exposition ; laissons les choses du présent
scientifiques et bruyantes. — Evoquons l'image du passé ;
le vieux Lyon, silencieux, aux rues obscures et tortueuses,
aux lignes pittoresques; la fine silhouette du clocher pri-
mitif de Fourvières se profilant, sur le ciel, au soleil cou-
chant ; la Saône baignant le pied des maisons ; les eaux du
Rhône battant le quai de l'Hôtel-Dieu d'un côté, de l'autre
se perdant sous le feuillage ; le brouillard flottant indécis
entre les deux fleuves et couvrant de son voile mystérieux
cette cité travailleuse et paisible qui, violemment sortie de
sa nature, pendant la Révolution, avait repris sa vie labo-
rieuse et réglée.
N'était-ce pas là un lieu tranquille, sûr, discret, à proxi-
mité de la Suisse, de l'Italie, bien fait pour attirer de
malheureuses femmes exilées à quarante lieues de Paris,
par le terrible Bonaporte ?
En effet, pendant quelques années, c'est à Lyon un va
et vient continuel : Mmc de Staél, Mme de Narbonne,
duchesse de Chevreuse, Mme Récamier, toutes trois exilées,